En Amazonie brésilienne, la déforestation a augmenté de 22% en un an. Le gouvernement du président Jair Bolsonaro a pourtant promis de lutter contre la déforestation, alors que scientifiques, ONG et autochtones pointent du doigt la responsabilité des dirigeants brésiliens.
La déforestation s’accélère en Amazonie brésilienne, avec une augmentation de 22% en un an. Et ce malgré les annonces du gouvernement du président Jair Bolsonaro, qui promettait des actions plus « fermes ». Depuis plusieurs mois, les scientifiques alertent sur le point de bascule climatique. Une alerte relayée par les autochtones et les ONG qui accusent le gouvernement de détruire les politiques de protection environnementale.
En Amazonie, la déforestation a atteint un taux record sur les quinze dernières années. Entre août 2020 et juillet dernier, le déboisement s’est étendu sur 13.235 km2. Soit la surface la plus importante depuis 2005-2006 selon les données de l’Institut national de recherche spatiale (INPE) du Brésil.
En comparaison, la déforestation amazonienne atteint chaque année la superficie du Liban. C’est-à-dire environ 10.000 km2 depuis trois ans, contre 6.500 km2 pendant la décennie précédente.
Le paradoxe gouvernemental
C’est la troisième année consécutive que la déforestation progresse depuis l’arrivée au pouvoir du président d’extrême droite Jair Bolsonaro. Ce dernier est accusé d’avoir affaibli la surveillance du biome (écosystème) amazonien et encouragé les activités extractives dans des zones protégées.
Le ministre brésilien de l’Environnement Joaquim Leite n’a pas hésité à condamner ces “délits environnementaux” face auxquels le gouvernement devrait se montrer plus ferme. Cependant, ce même ministre a défendu que ces données « ne reflètent pas exactement la réalité des derniers mois. » En effet, le gouvernement brésilien assure avoir intensifié ses efforts pour lutter contre la déforestation illégale. Notamment par une présence militaire depuis trois mois dans les zones les plus touchées.
Plus surprenant encore, le Brésil réclamait quelques jours avant la COP26 une indemnisation pour sa lutte contre la déforestation. Le vice-président Hamilton Mourao défendait en effet que le Brésil “devrait être indemnisé pour avoir fait ce travail au nom du reste de l’humanité.” Le gouvernement brésilien estime à entre 30 et 40 milliards de dollars sa contribution depuis 2006 à la lutte contre la déforestation de l’Amazonie.
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Le sort des autochtones
Le Brésil représente près de 60% de l’ensemble du bassin amazonien. Or, à son arrivée au pouvoir en 2019, le président Jair Bolsonaro déclarait vouloir ouvrir les terres protégées et les réserves indigènes à l’agriculture et à l’extraction minière.
En octobre dernier, Gregorio Mirabal, leader autochtone, alertait contre une “apocalypse” mondiale en Amazonie. “Avec Jair Bolsonaro, la déforestation, les mines illégales et les meurtres de nos frères et sœurs ont augmenté. C’est le pire gouvernement que nous ayons dans le bassin amazonien”, résumait-il. Même son de cloche pour le cacique Ninawa, chef du peuple amazonien Huni Kui. En novembre dernier, il dénonçait un “génocide” des peuples autochtones et pointait la responsabilité des dirigeants politiques.
Pour la première fois de l’histoire en août dernier, les tribus indigènes ont saisi la Cour pénale internationale pour dénoncer la “politique anti-indigène” de Jair Bolsonaro. Le cacique Raoni évoquant alors des “crimes contre l’humanité”.
ONG et scientifiques tirent la sonnette d’alarme
En mai dernier, une équipe internationale de chercheurs alertait sur le basculement climatique de la forêt amazonienne. Depuis 2010, cette dernière rejette plus de CO2 qu’elle n’en absorbe. L’étude révélait aussi l’explosion de la déforestation en Amazonie brésilienne en 2019, année de l’arrivée au pouvoir de Jair Bolsonaro.
L’Observatoire du climat, réseau d’ONG et d’instituts environnementaux brésiliens, ne cesse d’alerter sur ce problème d’envergure. Son secrétaire exécutif Marcio Astrini déclarait que « ce résultat est le fruit d’un effort persistant, planifié et continu pour détruire les politiques de protection de l’environnement. »
L’Observatoire rappelait également que le Brésil est le seul grand émetteur de gaz à effet de serre du monde qui a augmenté ses émissions pendant la pandémie. Mais le réseau d’ONG a surtout accusé le gouvernement d’avoir “délibérément omis” de dévoiler ces dernières données jusqu’après la COP26. En effet, le document, seulement publié ce jeudi 18 novembre par l’INPE, date pourtant du 27 octobre dernier.
Lors de la COP26 à Glasgow, le Brésil s’est engagé à avancer de deux ans, de 2030 à 2028, la date limite pour éliminer la déforestation illégale sur son territoire. Un engagement auquel Jair Bolsonaro devra se tenir, bien qu’il n’ait pas assisté à la COP26. Le président brésilien voit les ONG écologistes comme un “cancer”.
Jeanne Guarato