Le gouvernement colombien souhaite reprendre les pulvérisations aériennes de glyphosate sur les narco-cultures illicites. Une décision vivement rejetée mardi par la principale association de producteurs de coca qui a appelé à la mobilisation.
Le glyphosate pourrait bientôt devenir le principal outil de lutte anti-drogue en Colombie, premier producteur mondial de cocaïne,. Les pulvérisations de glyphosate y ont pourtant été suspendues en 2015 en raison des risques sanitaires et sur l’environnement. Le président de l’époque, Juan Manuel Santos, avait pris cette décision après le classement du glyphosate comme cancérigène probable par l’Organisation mondiale de la santé.
Son successeur Ivan Duque a exprimé à plusieurs reprises la nécessité selon lui de reprendre les pulvérisations aériennes de glyphosate. Il souhaite ainsi éradiquer les plantations illicites de coca, matière première de la cocaïne. « Nous exprimons notre rejet du décret » signé lundi « comme un outil privilégié de la politique anti-drogue du gouvernement« , a déclaré la Coordination nationale des producteurs de coca, de pavot et de marijuana (Coccam) dans un communiqué.
Colombie: le glyphosate, allié de la lutte anti-drogue
Le ministre de la Défense Diego Molano a signé un décret en vue de reprendre les pulvérisations aériennes de glyphosate. Les pulvérisations ne pourront être effectuées que « dans les zones de culture intensive où une forte présence de groupes armés » est décelée, a-t-il déclaré lundi sur W Radio. Le décret prévoit la consultation des communautés indigènes des zones visées et des contrôles réguliers sur les éventuels dommages à la santé et à l’environnement.
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Toutefois, pour pouvoir reprendre les pulvérisations aériennes, le gouvernement doit encore obtenir l’approbation du Conseil national des stupéfiants (CNE). Ce dernier avait suspendu l’éradication sous l’injonction des tribunaux. Selon la Coccam, les pulvérisations aériennes violent les accords de paix de 2016 avec la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC).
Un regain de violence attribué aux narcotrafiquants
« Nous ne comprenons pas pourquoi le gouvernement insiste pour déchirer l’accord de paix et piétiner la confiance entre communautés« , alors que « 98% des familles inscrites » au programme de substitution des cultures illicites « ont respecté l’accord« , a estimé la Coccam. Depuis l’arrivée au pouvoir d’Ivan Duque en 2018, la superficie de narco-cultures a été réduite. Elle est ainsi passée de 171.000 hectares en 2017 à 154.000 aujourd’hui. Elle était toutefois de 48.000 hectares en 2012, selon l’ONU.
Ce retour aux pulvérisations aériennes d’herbicide intervient dans un contexte de forte recrudescence de la violence dans le pays. Ivan Duque l’attribue à des groupes qui se financent grâce au trafic de drogue et à l’exploitation minière illégale. Malgré quatre décennies de lutte contre le trafic de drogue, la Colombie produit près de 70% de la cocaïne qui circule dans le monde. Et les États-Unis en sont le premier consommateur.
Natura Sciences avec AFP