Lemon Tri est une start-up qui propose des solutions de tri pour les entreprises, les lieux publics et les événements. Objectif : sensibiliser et booster le recyclage hors-domicile du plastique, du métal, du papier, etc. Elle nous a ouvert les portes de son entrepôt situé à Pantin (93).
Lemon Tri dispose d’une large gamme de machines de tri. Il y en a avec ou sans compacteurs électriques, mais aussi avec des compacteurs mécaniques. Elles se retrouvent en entreprises, dans les supermarchés, sur des événements ou des festivals. Le geste de tri est récompensé par des bons d’achats ou par des petits cadeaux à gagner selon un système de loterie. « Notre objectif est de ramener de nouvelles personnes vers le tri grâce au jeu et à l’incitation », explique Augustin Jaclin, co-fondateur de Lemon Tri. La start-up dispose aussi d’une solution pour les aéroports : sa machine LIQUID sépare les liquides des emballages. Les bouteilles sont compactées, les liquides récupérés dans un bidon, ou envoyés au tout à l’égout. Désormais, la start-up propose aussi une gamme de bacs simples pour récupérer séparément les cartouches d’encres, les capsules de café, les ampoules, le papier, les films souples, les gobelets…
Un geste de tri plus en plus étendu
Le succès de l’entreprise qui a remporté une quinzaine de prix, que cela soit pour l’aspect technique ou social, ne se dément pas. En 2015, elle ne traitait encore que 12 tonnes de déchets par an. En 2016, elle bondissait à 120 tonnes. Et pour 2017, Augustin Jaclin vise les 400 tonnes. En 2018, il espère même atteindre les 1.000 tonnes. « Notre solution a connu une énorme accélération grâce aux machines dans les supermarchés, déclare-t-il. En moyenne, nous sommes à 600 bouteilles par jour en supermarché ; notre record est de 4.200 bouteilles en une seule journée ». Et l’entreprise ouvrira d’ici novembre un nouveau site à Marseille. « Cela est nécessaire si nous voulons faire bouger les lignes sur le tri », prévient le co-fondateur.
Lemon Tri prône avant tout la qualité du recyclage
Ses machines électriques n’acceptent que les emballages qu’elles sont habilitées à recevoir. Pour ce faire, elles reconnaissent la forme, la matière, mais peuvent aussi tout simplement reconnaître le code-barre. Ainsi, elles isolent les différents flux de gobelets, bouteilles et canettes. De quoi avoir un gisement extrêmement pur pour chaque matière. Cette technologie permet de s’affranchir du centre de tri. Si nécessaire, les emballages récoltés sont surtriés directement dans les locaux de Lemon Tri à Pantin. L’entreprise traite donc directement avec les recycleurs et plasturgistes pour les bouteilles, avec les alumineries et aciéries pour les canettes.
« C’est très simple : tout ce qui rentre dans notre usine part au recyclage matière », assure Augustin Jaclin. Cela comprend bien sûr le contenu trié des machines et les sacs en plastique qui contiennent les déchets. Mais aussi les films et les cartons emballant les machines neuves. L’entreprise privilégie au maximum le recyclage dans des filières d’excellence, notamment des usines qui incorporent le plastique recyclé dans des bouteilles au contact alimentaire plutôt que dans des polaires synthétiques. « La solution est d’avoir un bon tri initial, des circuits courts et des filières d’excellence pour ne pas faire du recyclage au rabais », résume Augustin Jaclin.
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Comment se passe le tri à l’usine?
Lorsque les camionnettes arrivent à l’entrepôt de Pantin, les logisticiens mettent de côté les déchets spécifiques: ampoules, cartouches, capsules, papier… Ils seront massifiés avant d’être envoyés en usine de recyclage. Les bouteilles qui n’ont pas connu de compression électrique passent par un perforateur. Ce dernier troue les bouteilles et les compacte pour « casser les molécules et ne pas avoir de mémoire de forme », explicite Augustin. Puis, les bouteilles peuvent passer dans la presse, made in France, fournie par Sacria. Une autre machine permet de séparer les canettes en aluminium de celles en acier.
L’entrepôt permet de reconvertir ou réparer les machines dans un atelier dédié. Il y a aussi le labo du plastique qui accueille écoles, entreprises et journées portes ouvertes. Lemon Tri y y reproduit à petite échelle certains processus clé du recyclage industriel du plastique PET.
Des innovations pour booster le recyclage
L’entreprise mise aussi sur l’innovation. Gallia, un brasseur voisin utilise des fûts en plastique à usage unique. Ceux-ci sont fournis par l’entreprise Keykeg qui dispose d’un brevet mondial. L’avantage : ses emballages sont beaucoup plus légers que les fûts en métal. Mais l’inconvénient de taille est qu’il n’existe pas à ce jour de solutions pour les recycler. Notre guide n’a pas voulu se laisser abattre. Dans l’atelier, les logisticiens isolent les deux matières du fût (du PET et du PP) et font des essais de recyclage avec un recycleur local, Greenrecup’. Les premiers résultats sont encourageants. Augustin Jaclin imagine déjà créer une nouvelle filière française pour ces emballages.
L’entreprise est également parmi les seules à recycler les gobelets en carton. « Dans les gobelets, il y a un petit film en polyéthylène qui recouvre l’intérieur », nous éclaire Augustin. Il faut donc un procédé spécial pour le recyclage, le même que celui utilisé pour les emballages Tetra Pak. « Nous avons toutes les technologies, ce qui se pose, c’est un défi de massification », explique-t-il. Pour les gobelets de café en polypropylène ou polystyrène, le défi est le même. « Ce n’est pas un enjeu technique, mais un enjeu de rentabilité, détaille le co-fondateur. Cela pose le défi de la massification et de la propreté du gisement ». Un très bon tri à la source est nécessaire, car tout surti postérieur rallonge d’autant les coûts.
Une entreprise sociale et solidaire
Lemon Tri a lancé en 2016 la co-entreprise Lemon Aide avec la Fondation Agir Contre l’Exclusion et le soutien de Danone. Celle-ci est chargée de la logistique : collecte, tri, conditionnement et envoi en filières de recyclage. Les fondateurs de Lemon Tri tenaient à rapprocher la technologie et le social.
Les logisticiens de l’entreprise, sont en insertion pour une durée de 6 mois. « 20% du temps de travail des salariés de Lemon Aide est dédié à de la formation et à un accompagnement socio-professionnel, assure Augustin Jaclin. Au bout de 6 mois, ils peuvent conduire des engins de manutention, faire des réparations ou encore expliquer les procédés de recyclage. » Par ailleurs, Lemon Tri reverse 50% du prix de la vente des bouchons de bouteilles à l’association CAPSAAA qui finance des fauteuils pour sportifs en situation de handicap.
Auteur : Matthieu Combe, fondateur du webzine Natura-sciences.com