Plus de 130.000 personnes ont voté à la Primaire Populaire. L’objectif? Désigner les dix personnalités pouvant porter les dix idées d’un socle commun à la gauche en vue de la présidentielle. Ces personnalités doivent désormais se déclarer favorables ou non à participer à cette primaire, dont le vote se tiendra du 13 au 16 janvier prochain.

La course à l’Élysée est lancée. Chaque parti désigne son candidat, organise des primaires, ou des congrès. Portée par l’association 2022 ou Jamais, la Primaire Populaire propose quant à elle une nouvelle démarche. Pour la première fois dans l’Hexagone, elle a demandé aux français de désigner dix personnalités. Cinq hommes et cinq femmes issus aussi bien de partis politiques que de la société civile. L’objectif? Les amener à participer à une primaire, pour faire émerger un candidat commun à la gauche en vu de la présidentielle.
Du ras-le-bol au vote en ligne
L’initiative est née d’un ras-le-bol. « Le ras le bol de la manière dont se fait la politique aujourd’hui dans notre pays », explique Mathilde Imer, porte-parole de la Primaire Populaire. « On a l’impression que nos vies sont secondaires par rapport à l’urgence climatique et sociale qu’il y a aujourd’hui dans notre pays », estime-t-elle.
Les organisateurs du mouvement invitent tous ceux qui se reconnaissent dans ces propositions, à aller encore voter sur leur site. « Les partis aujourd’hui sont en train de faire une croix sur l’élection de 2022. La vraie question est: comment on les remet dans une dynamique où ils sont capables de gagner? Parce que quand on a peur de perdre, on se replie sur soi, on essaie juste de survivre. Et c’est ce qu’il se passe. Il sont juste en train de se mettre en préparation pour les législatives et pour 2027 », estime Mathilde Imer. « Pour nous, c’est hors de question, parce qu’entre temps il y a nos vies. Cinq ans sur les questions climatiques c’est pas possible au vu du rapport du Giec, qui dit qu’on a que dix ans pour agir et que les rapports sont toujours de pire en pire. Pareil pour les questions sociales », déclare-t-elle.
Un socle commun basé sur dix propositions
Un socle commun a été déterminé pour choisir ces dix personnalités. Il se compose de 10 propositions « pour une république écologique, pour une république sociale, pour une république démocratique ». « On a eu une première étape, avant l’été, durant laquelle on s’est fait connaître des candidats et candidates de l’ensemble des partis politiques qui portent l’écologie et la justice sociale. On a travaillé avec eux et l’aboutissement de ce travail a été ce socle commun avec ces dix mesures de bascule », explique la porte parole.
Parmi ces propositions, il est possible de retrouver l’accès pour tous et toutes à une alimentation saine pour nos corps et la nature, un volume minimum gratuit pour l’eau, le gaz et l’électricité avec une progressivité des tarifs pour les ménages, ou encore des investissements dans le système hospitalier et les métiers du soin. « Ces mesures ont été travaillées pendant six semaines avec l’ensemble des treize partis politiques de l’arc éco-humaniste, et les gros candidats qui portent l’écologie et la justice sociale qui sont déjà lancés dans l’élection présidentielle. Ils ont tous mis une sorte de label de compatibilité avec leur propre ligne politique. Autrement dit, on est tous d’accord sur ces enjeux là. Ce qui est très différenciant de candidats comme Emmanuel Macron, Marine Le Pen ou Eric Zemmour », raconte Mathilde Imer.
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Dix personnalité sélectionnés avec parité
Le vote pour choisir ces personnalités a débuté le 11 juillet dernier. Depuis, plus de 130.000 français ont participé. Ils ont déterminé celles et ceux qu’ils estiment les mieux placés pour représenter ce socle commun en vu de 2022. Les organisateurs avaient un objectif fixé autour de 300.000 participants. Le résultat ne les déçoit pas pour autant. « On a toujours cet objectif, mais le premier bilan est qu’avoir 130.000 participants à un processus politique très en amont de la présidentielle, c’est beaucoup. Il y a encore beaucoup de travail pour arriver aux objectifs qu’on s’était fixés. On veut continuer à rassembler des centaines de citoyens et citoyennes pour être encore plus nombreux à exprimer cette pression. On sait que la colère existe et que 75 à 85% des gens qui se disent prêts à voter à la gauche de Macron ont envie d’une candidature de rassemblement capable de gagner », explique Samuel Grzybowskyi, également porte-parole de la Primaire Populaire.
Les cinq femmes arrivées en tête de ce vote sont : Anna Agueb-Porterie, Clémentine Autain, Anne Hidalgo, Charlotte Marchandise et Christiane Taubira. Du côté des hommes se sont distingués : Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot, Gaël Giraud, Pierre Larrouturou et François Ruffin. Ces personnalités désignées ont jusqu’au 30 novembre prochain pour annoncer si elles participent ou non à cette Primaire Populaire. « C’est sûr que la montre tourne pour les élections de 2022, mais on se connait avec les dix personnalités. On se parle toutes les semaines, très régulièrement. Un téléphone rouge est ouvert. Il y a cette curiosité, mais maintenant il faut qu’on passe de la curiosité à l’action. On espère que nos propositions vont les convaincre », explique Samuel Grzybowski.
Dix candidats potentiels, mais combien de participants?
Trois personnalités ont d’ores et déjà déclaré qu’elles seraient candidates à la Primaire Populaire. Il s’agit de Charlotte Marchandise, Anna Agueb-Porterie et Pierre Larrouturou. « Ils ont conscience que ce n’est pas dans ces conditions qu’on va faire une primaire, qu’il faut élargir, et qu’on a besoin des sept autres », ajoute le porte-parole. Des débats entre les candidats devraient se tenir une fois que la liste définitive sera établie.
Lorsque toutes les personnalités se seront déclaré ou non candidates à la Primaire Populaire, un vote sera organisé. Il aura lieu du 13 au 16 janvier prochain. Un scrutin qui sera au jugement majoritaire à un seul tour. « Le vote arrivera quoi qu’il arrive », insiste Samuel Grzybowski. Des points d’information et d’inscription à ce vote se tiendront partout en France dans les prochaines semaines. Selon le porte parole, « maintenant, la balle est dans le camp de ces dix personnalités qu’on interpelle ».
Au delà des logiques de partis
Pour l’instant, difficile d’imaginer la participation de Jean-Luc Mélenchon. En effet, il ne s’est pas soumis à une primaire de son propre parti. Clémentine Autain et François Ruffin sont en plus tous deux étiquetés France Insoumise. Compliqué aussi d’imaginer Yannick Jadot dans cette Primaire Populaire alors qu’il sort tout juste d’une primaire écologiste. « Pour l’instant il sont dans une logique de partis, dans laquelle ils ont besoin d’affirmer leur singularité. Aujourd’hui ils sont dans une course au leadership parce qu’ils savent qu’aucun d’entre eux n’est en mesure de gagner la présidentielle. Le message qu’on leur adresse est : soit soit on peut gagner ensemble, soit perdre chacun de son côté », déclare Samuel Grzybowski.
Il ne faut pas oublier Christiane Taubira, désignée parmi ces dix personnalités pouvant participer à cette Primaire Populaire. Elle semble réticente à l’idée de participer à la prochaine présidentielle. « Elle a dit: ‘je ne serai pas la candidate de l’émiettement’. Le message est clair, elle ne veut pas être une candidate de plus. Mais dans l’hypothèse où il y a une équipe gagnante, et un rassemblement, elle pourrait être cette candidate. Il faut sortir du présidentialisme et de la monarchie présidentielle. Ce n’est pas la figure providentielle qui va nous libérer des difficultés qu’on traverse. C’est une équipe de France de la solidarité et de l’écologie. Et je pense que Christiane Taubira fera partie de cette équipe », pense Samuel Grzybowski.
Vers la fin des partis?
Comment imaginer la suite si l’un des leaders de partis comme Jean-Luc Mélenchon, Anne Hidalgo ou Yannick Jadot, venait à participer et à perdre cette Primaire Populaire? Devrait-il alors se retirer? À cette question, Samuel Grzybowski répond: « Il faut qu’on arrive à créer quelque chose qui soit plus collectif que les appareils. Nous on essaie de réfléchir à l’intérêt commun. C’est un nouveau récit, un nouvel imaginaire à créer. Penser impact, plutôt que de penser écurie. Penser résultats, plutôt que de penser partis politique”. Il précise qu’il “comprend très bien que ces hommes et ces femmes ont été investis par des partis politiques. « On ne leur demande pas de renier cette investiture, on leur demande de la dépasser », justifie-t-il.
Selon le porte parole de la Primaire Populaire, tous les partis représentés au travers de ces personnalités sont engagés dans cette démarche. « Il n’y a pas une seule équipe de campagne, il n’y a pas un seul staff de partis, où il n’y a pas des membres qui nous soutiennent activement. En public, ou en privé ».
Ouns Hamdi