Les 150 citoyens réunis au sein de la Convention citoyenne pour le climat dressent leurs 149 propositions. Visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40% d’ici 2030, certaines mesures proposent d’importantes transformations. Tour d’horizon.
C’est presque un sans faute. Sur les 150 propositions élaborées et soumises au vote de la Convention citoyenne pour le climat, 149 ont finalement été adoptées par l’ensemble de ses membres ce dimanche. La réduction du temps de travail à 28 heures par semaine ne les aura finalement pas convaincu. Parmi les propositions les plus discutées et commentées : la réduction de la vitesse sur autoroute à 110 km/h, une proposition de référendum pour la création du crime d’écocide, et une autre pour la modification de la Constitution afin d’y inscrire l’importance de la biodiversité, de l’environnement et de la lutte contre le dérèglement climatique pour la République. Emmanuel Macron recevra les 150 membres le 29 juin prochain afin de leur apporter les «premières réponses». Natura Sciences fait le point sur les principales propositions.
Malgré le manque d’ambition sur certains sujets clivants comme le nucléaire, la fiscalité et la taxe carbone, la majorité des réactions politiques et de la société civile salue le « sérieux » du travail accompli par les 150 citoyens tirés au sort. Certains émettent des regrets et réserves sur certaines propositions, comme le rapporte Le Monde. Toutefois, « la plupart des mesures prescrites par les citoyen·nes, si elles sont bien reprises dans leur ensemble, peuvent constituer une première étape vers un nécessaire changement radical de nos sociétés, des systèmes de production et de consommation », estime Greenpeace. « Les propositions de la Convention citoyenne sont d’une ampleur inédite et marqueraient un tournant dans la politique de notre pays si elles étaient adoptées par les pouvoirs publics », considère pour sa part Europe Ecologie Les Verts dans un communiqué.
De nouvelles orientations de consommation et de production
Les membres de la Convention citoyenne pour le climat, ou « les 150 , veulent limiter les consommation énergétique en rendant obligatoire la rénovation énergétique des bâtiments. Ils souhaitent limiter l’artificialisation des sols, soutenir l’agriculture et l’alimentation faiblement émettrices de gaz à effet de serre. Ils proposent en ce sens la mise en place de chèques alimentaires pour les plus démunis à utiliser dans des AMAP ou pour des produits bios. Dans le prolongement, ils imaginent un étiquetage obligatoire qui informerait sur le degré de transformation des produits alimentaires et veulent interdire les additifs alimentaires sous 5 ans.
Les 150 souhaitent transformer l’outil de production et soutenir l’innovation vers un modèle bas carbone. Ils appellent à transformer l’emploi et renforcer les obligations relatives à la préservation de l’environnement. Dans ce sens, ils proposent que les entreprises distribuant plus de 10 millions d’euros de dividendes par an financent la transition écologique à hauteur de 4% du montant des dividendes distribués chaque année. Ils souhaitent aussi conditionner les aides publiques à une baisse des émissions de gaz à effet de serre.
Encadrer la consommation, le plastique et la publicité
Les 150 appellent de leurs voeux un nouveau modèle de politique commerciale et davantage d’informations à destination des consommateurs. Ils veulent réformer la consommation à travers un meilleur affichage, une publicité plus encadrée, des actions contre le suremballage, une sensibilisation et une éducation accrue aux enjeux de l’environnement et du développement durable. Ils veulent ainsi développer « un score carbone » sur tous les produits de consommation et les services
Demain, les 150 souhaitent que les rayons vrac soient obligatoires dans tous les magasins. Ils votent pour le retour progressif d’un système de consigne de verre, lavable et réutilisable, avec une généralisation d’ici 2025. Ils incitent le gouvernement à rendre obligatoire le recyclage de tous les objets en plastique dès 2023. Et à interdire tous les plastiques à usage unique à cet horizon.
Les membres de la Convention souhaitent interdire la publicité pour les produits les plus polluants et mauvais pour la santé. Cela passerait par l’interdiction de publicité pour les produits proscrits par le Plan National Nutrition Santé Climat (PNNSC). Dans leur ligne de mire aussi les incitations quotidiennes à la consommation. Ils souhaitent ainsi mettre en place des mentions pour inciter à moins consommer dans les publicités. Dans le prolongement, ils aimeraient rendre obligatoire l’affichage des émissions de gaz à effet de serre dans les publicités.
Réformer les transports et le véhicule personnel
Côté transports, les 150 souhaitent faire reculer la place de la voiture personnelle et développer un parc de véhicules moins émetteurs. Dans cette perspective, ils souhaitent revoir l’aménagement de la voie publique. Les propositions visent à créer des parking relais, à interdire les véhicules polluants dans les centres villes et à généraliser les voies réservées pour les véhicules partagés et les transports collectifs sur les voies rapides. Afin de favoriser le remplacement du parc automobile, ils souhaitent interdire dès 2025 la vente des véhicules neufs les plus émetteurs. Des prêts à taux zéro, avec la garantie de l’État, pour l’achat des véhicules les moins émetteurs, pourraient voir le jour. Ils proposent en plus de réformer le système d’indemnité kilométrique de l’impôt sur le revenu.
Les 150 visent la réduction du transport routier de marchandises. En ce sens, ils proposent de remplacer les avantages fiscaux sur le gazole par des compensations fortes pour aider au financement de l’achat de poids-lourds neufs plus propres. La Convention souhaite aussi lutter contre les émissions des navires dans les ports, développer le train et limiter les effets néfastes du transport aérien. En particulier, elle propose la fin progressive du trafic aérien sur les vols intérieurs d’ici 2025 pour les lignes où il existe une alternative bas carbone sur les trajets de moins de 4 heures. C’est une proposition défendue par les ONG dans le cadre des plans de relance, bien qu’elles s’écharpent sur la durée des trajets à considérer, oscillant entre 3 heures et 6 heures.
Auteur : Matthieu Combe, journaliste du magazine Natura Sciences