Mardi 12 octobre, Alok Sharma a prononcé un discours à l’Unesco dans lequel il revient sur les enjeux de la COP26 qui se tiendra du 31 octobre au 12 novembre 2021 à Glasgow en Écosse. Au cours de ses déclarations, il appelle les pays signataires à maintenir les températures en dessous de 1,5°C et exige des ambitions climatiques plus fortes pour y parvenir. La pression est surtout donnée aux pays industrialisés, dont la promesse des 100 milliards de dollars n’a toujours pas été tenue.
Le choix de la capitale française n’est pas un hasard. Alok Sharma, président de la COP 26, prononçait un discours à l’Unesco ce mardi 12 octobre. Accompagné de Laurent Fabius, ancien premier ministre et président de la COP 21, il résume ses attentes envers les pays signataires de l’Accord de Paris, signé six années plus tôt en France. Alok Sharma pose cartes sur table. Le compte à rebours pour le changement climatique est lancé depuis longtemps. Il ne reste plus que 19 jours avant l’ouverture de la conférence mondiale sur le climat, et « les émissions de gaz à effet continuent d’augmenter » d’après le président de la COP26. Alors, quel enjeu pour la COP à venir ? Laurent Fabius le rappelle en introduction. « La Cop 21 est une référence mondiale pour la lutte contre le changement climatique, indique-t-il face aux caméras. La COP26 doit être, elle, la Cop d’action ». C’est pourquoi l’ancien premier ministre apporte son soutien au « succès indispensable » de l’événement qui se tiendra à Glasgow dans quelques semaines.
Honorer la promesse des 1,5°C
Alok Sharma insiste. « Les dirigeants mondiaux doivent honorer la promesse faite ici à Paris ». Malgré les rapports alarmants du Giec et de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), Alok Sharma semble optimiste sur la limite des températures à 1,5°C. Toutefois, il ne cache pas que cet objectif ne sera pas atteint si les pays signataires ne redoublent pas leurs efforts. « Les dirigeants mondiaux ont établi un consensus avec ambition et espoir, mais ce n’était que le début du chemin pour s’attaquer au changement climatique » déclare-t-il au siège de l’Unesco.
Le président de la COP26 appelle alors les États à « honorer la promesse faite à Paris » avant de lister les catastrophes naturelles mondiales que la planète a connues ces dernières années. Parmi elles, les tempêtes devenues plus fréquentes aux États-Unis, la fonte des glaciers, ou encore les chaleurs extrêmes au Canada… Il rappelle que ces phénomènes ne sont pas restées sans conséquences matérielles et morales.
Alok Sharma espère des mesures plus ambitieuses
Dans son discours, le président de la COP26 alerte une fois de plus les nations, et plus particulièrement les membres du G7 (Allemagne, le Canada, les États-Unis, le Japon, le Royaume-Uni et l’Union européenne), sur l’urgence et la nécessité d’agir. « Le succès ou l’échec de la COP26 est entre leurs mains, ainsi que le sort de l’Accord de Paris », insiste-il. Des propos que confirment les associations environnementales. « Ce sont des déclarations que l’on attend depuis longtemps, soutient Aurore Matthieu, responsable politiques internationales pour Réseau Action Climat. Alok Sharma a souligné que les États ne sont pas encore à la hauteur. Il faut continuer de défendre les 1,5°C ».
Pour y parvenir, le président de la Cop26 appelle les pays signataires à atteindre quatre objectifs distincts. Il attend de chaque État « la réduction des émissions, l’adaptation au changement climatique, le financement et la collaboration ». Ces axes permettraient, selon le président de la COP26, à « faire des négociations de Glasgow un succès ». Néanmoins, des progrès commencent à se faire remarquer. « De nombreux pays vulnérables montrent la voie, comme le Bhoutan et le Suriname, qui ont déjà atteint le niveau « net zéro », détaille Alok Sharma. Le petit État insulaire de Barbade, lui, ne consommera plus de combustibles fossiles d’ici 2030″. De ces constats, il invite les États membres du G7 et du G20 à poursuivre dans « la même voie ».
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Les 100 milliards de dollars promis n’ont toujours pas été atteints
Le mois dernier, le secrétaire général des Nations Unies a tapé du point sur la table et a estimé les engagements climatiques des pays signataires de l’Accord de Paris « insuffisants ». Les analyses du rapport de la CCNUCC évaluaient les dernières contributions déterminées (NDC) des États membres. Cependant, seulement 78% d’entre eux les ont soumises et les ont actualisées, soit un peu plus de la moitié des pays signataires. Mais parmi eux, certains n’affichent pas des objectifs à la hauteur des espérances « Certains, comme la Russie, l’Australie n’affichent pas des objectifs de réductions d’émissions assez ambitieux, commente Aurore Matthieu. D’autres ont baissé leurs ambitions, comme le Brésil ou le Mexique. On peut dire qu’il y a violation de l’esprit de l’Accord de Paris ». Pour l’experte, soumettre ses contributions avant l’ouverture de la COP26 ne suffit pas. « Il faut vérifier au sein des NDC s’il y a une amélioration » complète-t-elle.
S’il y a bien un point sur lequel insiste Alok Sharma durant son discours, ce sont les 100 milliards de dollars promis par les pays du nord, initialement prévus pour l’année 2020, pour aider les pays développés dans leur transition énergétique. « Il s’agit d’un chiffre totémique, un symbole de confiance, et la confiance est un bien fragile et difficile à gagner dans les négociations sur le climat » avertit le président de la COP26. Dans un rapport publié le mois dernier, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OECD) indique qu’en 2019, l’aide atteignait presque 80 milliards de dollars.
Une confiance mise à l’épreuve
Les 20 milliards de dollars manquant sont pourtant « essentiels » pour le succès de la COP à venir. « Cela peut impacter la confiance des pays du sud envers les pays du nord car l’écart n’est pas comblé, souligne Aurore Matthieu. Et au fil des années, les besoins ne peuvent qu’augmenter ». À ce jour, Alok Sharma et Jonathan Wilkinson, ministre de l’environnement du changement climatique au Canada, travaillent sur un plan stratégique pour que les pays développés puissent atteindre les 100 milliards promis. Si la somme n’est pas atteinte après la tenue de la COP26, les États devront rembourser l’écart manquant. Alok Sharma et Réseau Action Climat appellent alors tous deux les pays industrialisés à « prendre leurs responsabilités dans la crise climatique ».
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Alok Sharma ne nie cependant pas les progrès apportés au cours des derniers mois. Des accords environnementaux supplémentaires ont été conclus en juillet dernier avec les membres du G7. « Nous avons conclu un accord historique selon lequel aucun pays du G7 ne financerait plus aucun projet de charbon au niveau international », se félicite-t-il. Récemment, la Chine, actuellement le pays le plus émetteur au monde, a annoncé la neutralité carbone d’ici 2060 et la fin du financement des usines de charbon à l’étranger. L’organisme Réseau action climat juge ces mesures « trop vagues ». « C’est l’un des pays du G20 les plus attendus lors de la COP26 », précise la responsable politiques internationales. Mais pour Alok Sharma, les ambitions ne doivent pas s’arrêter là. « J’espère qu’à la COP 26, nous verrons de nouveaux engagements sur le charbon, les voitures, le méthane et la déforestation » ajoute-t-il. Reste à savoir si les négociations seront au beau fixe, pour espérer de telles mesures.
Sophie Cayuela