La lutte contre la pollution aux déchets plastiques a été au cœur de l’édition 2016 de Polytalk, organisée par l’association PlasticsEurope.
« Si rien ne change, en 2050 il y aura plus de plastique que de poissons dans les océans ». Cette phrase de Andrew Morlet, PDG de la fondation Ellen MacArthur résume bien l’urgence liée à l’état de nos fonds marins. En 2016, les 25 millions de tonnes de plastique présentes dans les océans enjoint les industries du secteur à tirer la sonnette d’alarme.
Ainsi, l’association PlasticsEurope a organisé à Bruxelles pour sa nouvelle édition deux jours de réflexion intitulés « Zero plastics to the oceans » (« Aucun déchet plastique dans les océans »). La capitale européenne est devenue le centre névralgique de la recherche de solutions en vue d’endiguer ce phénomène de pollution maritime qui fait rage sur toute la planète. Autour de Patrick Thomas, président de PlasticsEurope et PDG de Covestro – anciennement Bayer Material Sciences – géant de la fabrication de matières plastiques, universitaires, politiques et professionnels du secteur se sont réunis afin d’identifier la part de responsabilité de l’industrie et évoquer les perspectives d’avenir.
Ne se concentrer que sur les macro-déchets plastique ?
Le point d’achoppement de tous les acteurs en présence est le suivant : l’industrie plastique a une part de responsabilité indéniable dans la pollution maritime aux déchets plastiques et se doit d’agir. Si le postulat semble louable, d’aucuns pourraient s’interroger sur l’efficience de sa volonté d’action. « Pour le moment, aucune étude scientifique n’a prouvé que le plastique en lui-même était dangereux pour la nature. Si des animaux marins meurent à cause du plastique, c’est parce-qu’ils ont été étouffés par des déchets mais en aucun cas à cause d’un empoisonnement » affirme Michel Loubry, directeur de la région Ouest de PlasticsEurope.
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Il faut alors comprendre en filigrane que les industriels veulent se soucier des macro-déchets, à savoir tout objet plastique mesurant plus de cinq millimètres. De là à ce que certains y voient l’agitation d’un miroir aux alouettes, il n’y a qu’un pas. Tout discours tenu par des associations luttant pour la protection de l’environnement et pointant du doigt la dangerosité des micro-déchets est alors fustigé. Les micro-déchets, ne flottant pas à la surface de l’eau, ne semblent pas être un problème de premier ordre.
« Nous devons sensibiliser les gens, à commencer par les employés d’usine, afin qu’aucun déchet n’achève sa course un jour ou l’autre dans un cours d’eau. La plupart d’entre nous n’a pas conscience qu’un mégot de cigarette jeté dans le caniveau à Annecy peut se retrouver à Marseille dans la Méditerranée ». Par ces mots, Véronique Fraigneau, chargée des relations publiques chez PlasticsEurope, résume bien l’angle d’attaque choisi par les industriels pour éradiquer les déchets marins. Le but sera de tâcher à ce qu’aucun macro-déchet plastique ne se retrouve en mer. Ce qui impliquerait, de facto, une diminution des micro-déchets, issus de la détérioration des macro-déchets.
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Favoriser une économie circulaire
L’édition bruxelloise de Polytalk a été l’occasion d’évoquer des solutions concrètes pouvant être adoptées par les industriels du plastique, et les propositions étaient légion. Véronique Fraigneau a dévoilé en quoi consisterait la première étape d’action pour PlasticsEurope en affirmant qu’il est incompréhensible que des billes de plastique servant de matière première à la confection d’objets se retrouvent dans les océans. « Elles n’ont rien à faire là et sont la preuve que des déperditions polluantes se font tout au long de la chaîne de fabrication. Désormais, les employés des usines adhérant à notre association ont pour consigne de ramasser tout déchet tombé à terre, et des adaptations ont été faites au niveau des infrastructures en vue du même objectif ». « Il s’agit d’endiguer le problème à la source » comme l’indique Patrick Thomas.
Pour cela, la fondation Ellen MacArthur propose l’établissement d’un nouveau modèle. « A l’heure actuelle, la majorité des déchets sont enterrés. Seule une infime partie est incinérée, et encore moins recyclée. Cela est le fruit du modèle de consommation actuel répondant à la logique du « Extraire, Fabriquer, Jeter ». Le système atteignant aujourd’hui ses limites, nous prônons un passage à une économie circulaire » atteste son président Andrew Morlet.
Comme l’indique Richard Thompson, professeur à l’Université de Plymouth, l’idéal serait de conserver les bénéfices du plastique tout en limitant ses méfaits sur l’environnement. Dans le même temps, Mehmet Ceylan, vice-ministre turc du développement et attaché au ministère de l’environnement, pense que la répression et l’instauration de sanctions ne sont pas la bonne stratégie à adopter. En ce sens, les actions de sensibilisation sur le terrain sont saluées, à l’image de celles d’Isabelle Poitou, fondatrice de l’association Mer-Terre qui s’allie aux collectivités territoriales afin d’apprendre les bons gestes, notamment aux enfants. En effet, la lutte contre la pollution des océans ne doit pas être seulement le chemin de croix des industriels, mais l’affaire de tous.
Auteur : Chaymaa Deb, journaliste du webzine Natura-sciences.com