Le projet de loi issu des propositions de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) arrive mercredi en Conseil des ministres. Censé mettre la France sur le bon chemin pour réduire le réchauffement climatique, il est largement critiqué pour la faiblesse de ses ambitions. Plus de 100 organisations appellent à revoir à la hausse l’ambition du projet de loi.
Alors que le projet de loi « Climat et résilience » issu des propositions de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) va être présenté ce mercredi en Conseil des ministres, l’opposition entre le Gouvernement et les partisans d’une action plus radicale se durcit. Selon le gouvernement, ce texte reflète près de la moitié des 149 propositions de la Convention destinées à réduire de 40% les émissions de gaz à effet de serre de la France d’ici 2030 par rapport à 1990.
Mais pour les 150 citoyens, le CESE, le Haut Conseil pour le Climat et les ONG, le compte n’y est pas. Le projet de loi climat rend impossible en l’état l’atteinte des objectifs climatiques pour 2030. Ce lundi, dans une lettre ouverte à Emmanuel Macron, plus de 100 organisations, dont de nombreuses ONG, appellent à revoir à la hausse l’ambition du projet de loi. Elles y voient « un formidable potentiel de sortie « des » crises, climatique, sanitaire, économique et sociale ».
Ce mercredi, un rapport commandé par le gouvernement au cabinet de conseil Boston Consulting Group estime que pour atteindre les objectifs climatiques 2030, il faudra que l’ensemble des mesures prises durant le quinquennat soient exécutées dans leur intégralité. Et ce, « sans aucune exception ».
Les 150 citoyens se pencheront sur le texte fin février
Le texte qui arrive sur la table du Conseil des ministres comprend 65 articles et reprend les grands thèmes explorés par les 150 membres de la CCC. « C’est une étape », commente Mélanie Cosnier, co-présidente de l’association Les 150, regroupant la majorité des participants à la convention. Elle rappelle qu’un autre projet de loi adopté en janvier vise en parallèle à soumettre à référendum l’inscription de la protection de l’environnement dans la Constitution.
« Nous avons conscience que le texte est édulcoré » par rapport aux propositions initiales de la CCC, poursuit-elle. Les 150 citoyens rendront leur jugement sur ce texte à l’occasion de leur dernière session plénière prévue du 26 au 28 février. Ils étudieront alors le projet de loi, le plan de relance et le projet de loi de finance qui englobent certaines de leurs propositions.
« Des mesures extrêmement concrètes, extrêmement fortes » pour le gouvernement
Selon leur site sansfiltre.les150.fr, quatre mesures ont été entièrement appliquées, quatre partiellement appliquées, 18 débattues, 12 en danger, 10 rejetées et 99 n’ont pas encore été étudiées. Cette analyse se distingue largement de celle du gouvernement. Pour lui, 75 mesures ont été mises en œuvre et 71 sont en cours de mise en oeuvre.
« C’est une loi pivot, qui fait entrer l’écologie dans la vie quotidienne, qui va verdir notre modèle et notre société et jouer un rôle de catalyseur », expliquait la ministre Barabara Pompili dans le Journal du Dimanche. Le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, avait lui défendu mercredi « des mesures extrêmement concrètes, extrêmement fortes ». Mélanie Cosnier, elle, aimerait voir le texte « amendé ». « Nous sommes prêts à rencontrer tous les groupes politiques à l’Assemblée nationale puis au Sénat, pour leur expliquer nos mesures ».
Le CESE, le HCC, la CCC et des millions de personnes pour une action ambitieuse
Depuis des mois, des ONG et Cyril Dion, « garant » de la CCC, alertent sur le manque d’ambition du texte. Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) craint des avancées « limitées ». « Les nombreuses mesures du projet de loi, sont en générale pertinentes, mais restent néanmoins souvent limitées, différées, ou soumises à des conditions telles que leur mise en œuvre à terme rapproché est incertaine », prévient le CESE.
Le Haut conseil pour le climat (HCC) s’intéresse pour sa part au plan de relance. Il estime qu’il doit être plus favorable à la neutralité carbone. Les mesures restent insuffisantes alors qu’il faudrait « tripler le rythme annuel de réduction des émissions pour les diviser par six d’ici 2050″, analyse-t-il.
« Aujourd’hui ce ne sont plus seulement des ONG ou des activistes qui demandent à l’Etat d’agir, c’est la justice, le Conseil d’Etat, le HCC, la Convention citoyenne et des millions de personnes. Faire des promesses et des coups de com’ ne va plus suffire, Emmanuel Macron, désolé », twittait Cyril Dion le 3 février.
Une Commission spéciale et un débat parlementaire en avril
Le texte présenté mercredi par le gouvernement, sera examiné en mars par une commission spéciale à l’Assemblée nationale. Des députés de différentes commissions permanentes (affaires économiques, développement durable et aménagement du territoire…) participeront à cette nouvelle étape parlementaire sur le modèle de la commission chargée d’examiner le projet de loi contre le séparatisme.
Tous les groupes politiques seront représentés dans la commission spéciale, à proportion de leurs poids politiques. Celle-ci doit être officiellement annoncée après la présentation du texte en Conseil des ministres. Le texte devrait ensuite être examiné dans l’hémicycle lors de la première quinzaine du mois d’avril.
Matthieu Combe, avec AFP