Il subsiste aujourd’hui moins de 10 000 guépards, dont 2 000 à 3 000 en Namibie. À l’origine, l’aire de répartition du guépard englobait pratiquement toute l’Afrique à part l’extrême nord et la forêt équatoriale. Elle s’est réduite partout. L’espèce est encore relativement bien représentée, quoique de plus en plus rare, du sud de l’Éthiopie à la Namibie. Ailleurs il ne subsiste plus que des populations sporadiques.
Les guépards sont occasionnellement tués pour leur peau, le commerce illégal sévissant surtout dans le nord-est de l’Afrique et particulièrement à Djibouti. Des guépards vivants sont aussi exportés depuis la Somalie à destination de riches cheiks arabes d’Arabie Saoudite, des Émirats arabes et du Sultanat d’Oman.
L’espèce s’est éteinte dans 13 pays depuis un demi-siècle. Le guépard est inscrit en annexe 1 de la CITES, mais il existe des quotas d’exportation en provenance de trois pays (Botswana, Namibie, Zimbabwe), ce qui facilite le trafic. Le commerce légal de l’espèce concerne la chasse aux trophées : le Botswana, la Namibie et le Zimbabwe autorisent en moyenne 200 exportations par an. Il existe malheureusement de nombreuses fraudes, la corruption permettant souvent à un même permis de servir plusieurs fois. Par ailleurs, la chasse sportive aux ongulés est très populaire en Afrique du nord et au Sahel, et les proies naturelles du guépard sont éradiquées.
Dans sa globalité, l’espèce est inscrite sur la Liste rouge de l’UICN dans la catégorie « vulnérable » ; mais la sous-espèce asiatique (Acinonyx jubatus venaticus, 80 individus matures) et celle de l’Afrique du nord-ouest (A. j. hecki, moins de 250) sont cotées « en danger critique d’extinction ». Le guépard est considéré par le WCS comme un des carnivores les plus menacés d’Afrique.
Réduction de son habitat et du nombre de ses proies
La réduction de l’habitat et du nombre de proies sont les plus graves menaces pesant sur l’espèce. Dans l’est et le sud de l’Afrique, l’extension des terres agricoles aux dépens de la savane s’est accompagnée d’une intensification d’activités dégradant la savane comme le ramassage du bois, la fabrication de charbon de bois et le braconnage. Dans les savanes sèches sahéliennes et soudanaises, les populations de guépards ont considérablement souffert de la désertification et de l’envahissement par l’Homme.
La mortalité juvénile est très forte chez les guépards, beaucoup de jeunes sont dévorés par les lions, les hyènes, les chacals et les rapaces. Par ailleurs, les guépards adultes sont souvent obligés de céder leurs proies à des lions, des hyènes ou des lycaons. Le guépard souffre d’une forte homogénéité génétique qui s’aggrave du fait de l’effondrement des populations. Il s’en suit une grande sensibilité aux agents pathogènes (maladies virales), une baisse de la fertilité et une faible capacité à réagir aux perturbations environnementales.
Encore d’autres menaces pesant sur le guépard…
Du fait de leurs mœurs diurnes et de leur caractère craintif, les guépards peuvent être perturbés par une trop forte pression du tourisme : dans certaines réserves très populaires comme Masaï Mara, au Kenya, il n’est pas rare de voir 15 ou 20 véhicules 4×4 autour d’une famille de guépards… On a même vu des guépards écrasés sur les pistes.
Les guépards sont fréquemment tués par des gardiens de troupeaux ou des fermiers alors qu’ils ne causent que des dégâts mineurs. Ils préfèrent généralement les proies sauvages aux animaux domestiques même quand ceux-ci sont très nombreux. Sur l’ensemble du continent africain, les guépards ne sont responsables que de 3 % des pertes de bétail dues aux prédateurs. Au Sahara où l’espèce est extrêmement rare, les bergers touaregs organisent des expéditions punitives dès qu’un guépard est accusé d’avoir causé des pertes occasionnelles de jeunes chameaux ou de chèvres.
Quelques mots sur la biologie du guépard
Le guépard, Acinonyx jubatus, vit seul ou en petits groupes ne dépassant pas six individus. Ce sont souvent des mâles, frères d’une même portée, qui forment de petites coalitions, tandis que les femelles sont solitaires. Essentiellement diurne, il chasse le matin et le soir, parfois aussi les nuits de pleine lune car la vue est son sens le plus développé. Il est terrestre et, même s’il est capable d’atteindre des branches basses, il n’est taillé ni pour grimper ni pour effectuer des bonds spectaculaires. En fait, tout son corps est adapté pour un sprint violent et de courte durée.
Le guépard ne chasse pas à l’affût comme beaucoup de félins solitaires ; il s’approche doucement de sa proie puis fond sur elle comme la foudre à une vitesse pouvant atteindre 100 à 112 km/h. Son cœur est incapable de poursuivre un tel effort plus de quelques dizaines de secondes, et l’animal à bout de souffle doit ensuite récupérer un bon moment avant de pouvoir commencer son repas.
Les proies sont surtout des gazelles, impalas, ourébis, phacochères, lièvres, autruches, pintades et outardes. La capture d’une grosse proie (zèbre, gnou, damalisque, cobe Defassa) n’est possible que dans le cas où plusieurs guépards chassent en groupe. Il arrive qu’un lion ou des hyènes forcent un guépard à abandonner sa proie. Après 90 à 95 jours de gestation, la femelle met au monde deux à quatre petits (rarement cinq ou six), qui pèsent 250 à 300 g, sont allaités durant trois mois et deviennent indépendants entre 12 à 18 mois. La maturité sexuelle est atteinte à deux ans, la longévité peut atteindre 16 ans en captivité.
Auteur : Michel Louis, pour le Manuel des aires protégées d’Afrique francophone (extrait)