Le gouvernement a abandonné jeudi le projet controversé d’extension de l’aéroport international de Roissy via la construction d’un quatrième terminal. Il juge qu’il n’était « plus adapté aux enjeux actuels ». Une annonce qui a néanmoins suscité la méfiance des opposants à ce chantier colossal désormais mort-né.
Ce projet poursuivi par le gestionnaire des aéroports parisiens Groupe ADP, « n’a pas suffisamment fait la preuve de sa compatibilité avec les exigences croissantes en matière de réduction des impacts environnementaux du secteur aérien« , explique le gouvernement dans un communiqué. En plus, il » n’intègre pas suffisamment le développement à venir de l’avion vert« , ajoute-t-il.
Le gouvernement demande donc à ADP, dont il est l’actionnaire majoritaire, « d’abandonner ce projet de terminal 4 (T4) ». « Le Groupe ADP prend acte de cette demande », « l’une des conséquences de la crise du Covid-19″ qui a très durement touché le secteur aérien, a indiqué le gestionnaire. L’entreprise « engage un temps de réflexion sur les enjeux d’avenir de l’aéroport », selon son PDG Augustin de Romanet.
Un projet de terminal 4 controversé
Ce projet de 7 à 9 milliards d’euros, rejeté par nombre d’élus locaux et des ONG, passait par la construction à l’horizon 2037 d’un quatrième terminal. L’objectif visé : augmenter la capacité d’accueil de 40 millions de passagers par an.
L’annonce intervient au lendemain de la présentation par le gouvernement de son projet de loi Climat et Résilience. Issu des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, il reste vivement critiqué pour son manque d’ambition. Ce texte « encadre le développement des capacités aéroportuaires pour les rendre compatibles avec nos objectifs de lutte contre le changement climatique ». Il prévoit toutefois que « les adaptations et aménagements nécessaires aux aéroports à l’intérieur de leurs emprises restent possibles ».
Le gouvernement a dit compter sur ADP « pour concilier le développement du trafic hors réseau domestique, la préservation de la connectivité de la France et le renforcement du hub parisien avec les objectifs ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre du transport aérien ». Il lui demande de « présenter, dans les meilleurs délais possibles, un nouveau projet d’évolution de la plateforme de Paris-Charles-de-Gaulle s’inscrivant dans cette perspective ».
Les ONG demandent des garanties
Le collectif d’ONG Non au Terminal 4 a néanmoins réclamé des « garanties » et partage sa pétition. Des ONG connues sont au rendez-vous : Greenpeace France, Notre affaire à tous, Alternatiba Paris ou encore le Réseau Action Climat. Le collectif s’inquiète d’une augmentation possible des capacités de l’aéroport malgré tout. Dans un communiqué, les ONG « s’inquiètent de l’effet d’annonce et s’interrogent sur la teneur du nouveau projet, ainsi que sur les garanties juridiques apportées pour qu’il n’y ait pas d’augmentation des capacités d’accueil de Roissy, alors que le gouvernement se déclare ouvert à cette possibilité ».
Cet abandon représente « une très belle victoire, une victoire des écologistes », après « beaucoup de mobilisation » contre « ce projet idiot qui allait augmenter les émissions de gaz à effet de serre et générer beaucoup de nuisances », a réagi de son côté le secrétaire national d’EELV Julien Bayou. A contrario, le patron du Medef Geoffroy Roux de Bézieux a estimé « un peu prématuré » d’avoir décidé de tirer un trait sur un terminal supplémentaire. « J’aurais compris la suspension. Parce qu’objectivement, le trafic aérien, on le voit tous (…) ce n’est plus les croissances qu’on imaginait il y a encore deux ans ou quelques années ». La crise sanitaire mondiale, qui a réduit le trafic aérien à la portion congrue, a en effet jeté le doute sur l’accroissement continu des flux de voyageurs et donc la nécessité d’adapter les infrastructures.
Le projet du nouveau terminal avait déjà subi un revers en juillet 2020. L’Autorité environnementale avait alors constaté que « l’équation à résoudre » entre l’augmentation des vols, la circulation routière et le respect des objectifs internationaux de la France en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre n’était « pas décrite ni posée de manière complète ».
Natura Sciences avec AFP