Lutter contre la déforestation ou l’agriculture intensive peut avoir des effets positifs sur les récifs coralliens. Une étude de l’université de Stanford, réalisée avec WWF, détaille les bénéfices de ces interventions sur le Grand Récif Maya.
Selon le WWF, les récifs coralliens abritent 25% de la vie marine de notre planète. Mais le dérèglement climatique menace ces écosystèmes. Certaines de ces menaces sont bien connues, comme le blanchiment des coraux, causé par la hausse des températures marines. Mais savez-vous que la déforestation, les activités balnéaires, l’exploitation minière et agricole impactent non seulement leur environnement mais également l’eau qui les traverse ? Cette eau contaminée vient ensuite impacter les récifs coralliens lorsqu’elle rejoint les océans.
Une étude de l’université de Stanford, étudie les effets de différentes interventions au niveau des bassins versants sur la santé des coraux. Celle-ci a été réalisée en collaboration avec le WWF, l’initiative Healthy Reefs ainsi que d’autres organisations du projet Smart Coasts. Publiée le 22 avril dans la revue de référence Nature, l’étude se concentre sur la barrière de corail mésoaméricaine, aussi surnommée Grand Récif Maya. Cette dernière suit plus de 1.000 kilomètres de côte le long de quatre pays dans la mer des Caraïbes.
L’étude se concentre sur les bassins versants du Belize, du Guatemala et de l’Honduras, pour lesquels la préservation de cette barrière de corail est primordiale. Car, « les récifs coralliens en bonne santé fournissent des bénéfices économiques, sociaux et environnementaux essentiels aux communautés qui en dépendent. Cela inclut la protection côtière contre les tempêtes, la régulation du climat, l’écotourisme et les pêcheries qui nourrissent les communautés », précise le communiqué de l’étude. Selon les chercheurs, plus de deux millions de personnes dépendent du grand récif Maya pour vivre.
Restaurer, protéger et agriculture durable pour protéger les coraux
Lors de cette étude, les scientifiques se sont concentrés sur trois types d’interventions. Premièrement, la restauration des bassins versants consiste à restaurer des zones agricoles en forêt native. Ensuite, la protection des bassins versants, « donne la priorité à la conservation des forêts existantes », explique l’étude. Enfin, la troisième méthode s’axe sur la transition de l’agriculture et de l’élevage conventionnels en agroforesterie et en sylvopastoralisme.
Ces trois méthodes visent à diminuer la quantité de sédiments emportée par les cours d’eau. En effet, ce sont ces sédiments, notamment en troublant la transparence de l’eau, qui impactent la photosynthèse réalisée par les microalgues du corail, qui représentent la majorité des apports nutritifs de ce dernier. « Ces interventions dans les bassins versants protègent et améliorent le stockage et la séquestration du carbone sur terre et dans l’océan, tout en soutenant l’adaptation au changement climatique grâce à la fourniture de bénéfices sociétaux », ajoute l’étude.
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Grâce à des modèles, Jade Delevaux, l’autrice principale de l’étude et chercheuse au Natural Capital Project de Stanford, a pu mesurer, avec ses collègues, les effets de ces interventions sur la santé des coraux. Les chercheurs de Stanford soulignent le potentiel de ces trois types d’interventions. En effet, ils sont tous en mesure d’augmenter « la rétention des sédiments, la santé des coraux, le tourisme côtier et marin, la biomasse ciblée de poissons, et la protection côtière dans toute la région », précise l’étude.
Toutefois, l’ampleur des bénéfices de ces interventions diffèrent selon les bassins versants. Ainsi, « pour chaque intervention, plus de la moitié de l’augmentation potentielle totale de la rétention des sédiments au niveau régional se produit dans les bassins versants honduriens, suivis des bassins versants guatémaltèques et du bassin versant de la rivière Belize », précise l’étude.
Des interventions aux échelles régionales, nationales et internationales
Afin d’implémenter ces interventions de la manière la plus efficace possible, il est important de comprendre les liens entre les écosystèmes terrestres et maritimes. Selon les chercheurs, « concevoir et mettre en œuvre de manière stratégique des interventions dans les bassins versants visant à préserver et restaurer les forêts tropicales, les mangroves et les récifs coralliens offre des moyens puissants de relever les objectifs de l’Accord de Paris sur le climat, des Objectifs de développement durable des Nations unies et de la Convention sur la diversité biologique ».
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Les interventions déployées à l’échelle régionale sont les plus efficaces pour améliorer la santé corallienne. Toutefois avoir une politique nationale et internationale de protection des coraux étend la zone de protection et maximise les bénéfices écologiques et sociétaux. « Pour restaurer la nature – dans ce cas, une grande barrière de corail – ce sont les actions collaboratives internationales à grande échelle qui seront les plus bénéfiques », affirme Jade Delevaux. « Conjointement, si vous voulez soutenir la résilience des communautés côtières en protégeant les propriétés et les infrastructures le long de la côte ou les moyens de subsistance liés au tourisme, vous prendrez probablement des décisions à plus petite échelle », ajoute la chercheuse.
Comme le rappellent les chercheurs, il est impossible d’implémenter toutes les solutions à toutes les échelles simultanément. « Pour chaque intervention, le WWF et les autorités locales ont identifié des zones cibles réalistes », détaille l’étude. Les différentes interventions ont ensuite été priorisées dans chacune de ces zones afin de maximiser leurs bénéfices. « Prendre en compte les dimensions sociétales et écologiques lors de la conception et de la mise en œuvre des interventions dans les bassins versants peut aider à préserver et à restaurer les forêts tropicales et les écosystèmes récifaux de corail tout en s’attaquant aux objectifs d’atténuation et d’adaptation de l’Accord de Paris sur le climat, des Objectifs de développement durable des Nations unies et de la Convention sur la diversité biologique », préviennent les chercheurs.