Face aux effets du changement climatique, la Polynésie française adapte ses moyens de construction. En tant que leader du BTP dans la région, l’entreprise Boyer est un témoin de choix de l’évolution des pratiques en cours. Entretien avec Laurent Seignobos, son directeur général.
– Contenu de marque élaboré avec Boyer –
La Polynésie française se trouve en plein cœur du Pacifique sud. Elle compte plus de 304.000 habitants, 118 îles dont 76 habitées, réparties en 5 archipels. Particulièrement menacée par la montée des eaux due au dérèglement climatique, la région cherche s’adapte. En tant que directeur général de Boyer, entreprise leader du BTP dans la région, Laurent Seignobos voit le changement climatique comme un défi à relever pour que les habitants puissent rester vivre dans leur île natale et que les touristes puissent continuer d’affluer.
Natura Sciences : En Polynésie française, depuis le 1er janvier 2023, toutes les nouvelle constructions situées en bord de mer doivent être surélevées de 50 cm à 1 mètre. Comment adaptez-vous vos activités au risque de submersion ?
Laurent Seignobos : Effectivement depuis ce début d’année, les permis de construire d’immeubles et villas en bord de mer ou en bord de rivière doivent être revus sur le paramètre de la hauteur. La construction sur pilotis entre dans les nouveaux concepts architecturaux et permet de répondre à cette question. Par ailleurs, certains terrains sont rehaussés avant construction. De même, des protections de berges par blocs naturels ou blocs artificiels apparaissent dans les nouveaux projets.
Comment cherchez-vous à diminuer votre impact sur l’environnement ?
Nous sommes en recherche continue de nouveaux process pour construire de façon plus vertueuse. Par exemple, la protection des récifs coralliens et de leurs écosystèmes est un sujet de première importance pour la biodiversité en Polynésie. Chez Boyer, nous sommes très attentifs à cette question.
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Ainsi, Boyer a créé des pieux en acier pour supporter les bungalow des hôtels sur lagon. Cette technique constructive évite d’avoir à opérer des terrassements qui sont destructeurs du corail. En effet, le pieu en acier perfore sur un diamètre très réduit (à la manière d’un emporte-pièce), ce qui minimise l’impact sur le corail, à la différence de l’ancienne technique qui consistait à poser de larges semelles de fondation en béton armé pour lesquelles d’importantes excavations étaient nécessaires.Toujours pour protéger le corail, nous prenons aussi en compte dans nos plannings la période de ponte des coraux.
Du fait de son isolement géographique, la Polynésie française compte un taux d’endémisme particulièrement élevé de la faune et la flore terrestre. Au-delà du corail, comment protéger cette biodiversité?
Dans notre planification, nous sommes attentifs à ne pas programmer nos travaux de battage – ou d’enfoncement de pieux – entre novembre et juillet, saison des baleines. Pour nous, la protection de la biodiversité passe aussi par la mise en place, lorsque c’est nécessaire, de rideaux à bulles autour du chantier, afin de limiter les nuisances sonores aquatiques qui pourraient perturber les espèces présentes.
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La protection de la biodiversité, c’est aussi se montrer vigilants par rapport aux espèce invasives. Par exemple, nous procédons à des mesures préventives afin d’éviter la propagation de la redoutable fourmi de feu (Solenopsis invicta). De même, dans les îles touchées par la prolifération des rats noirs, nous réalisons des tests et intervenons si besoin, car ces rongeurs représentent un danger pour les perruches locales.
Est-ce que le changement climatique fait évoluer vos travaux ? Sur quels travaux d’adaptation vous sollicite-t-on ?
La Polynésie française réfléchit à des protections de berges pour retarder la montée des eaux des îles les plus basses, car tous les habitants souhaitent légitimement rester vivre dans leur île natale. Des abris temporaires pour servir de refuge aux populations apparaissent progressivement, surtout dans les îles basses des Tuamotus. Il s’agit de constructions en béton armé très résistantes, avec habitation possible sur deux étages. Ces structures sont calculées pour faire face à l’action de houles et vents cycloniques. Des projets sont en construction au rythme de 4 à 5 par an et d’autres sont à l’étude.
La gestion des déchets est également un défi important sur les îles. Comment gérez-vous cette question sur vos chantiers ?
Dans ce domaine, Boyer a été précurseur dans l’utilisation du « big bag » moins générateur de déchets que les sacs de ciment classiques. Dans la même logique, pour le transport et le stockage du bitume, Boyer utilise des « tanktainers » (conteneurs-citernes) de 30 tonnes au lieu des fûts de 200 litres qui, dans le passé, étaient enfouis, après utilisation, au fil des chantier.
Et comment procédez-vous dans les îles où le tri des déchets est rarement présent ?
Certaines îles sont équipées de centres d’enfouissement technique (CET) comme Tahiti , Bora Bora, plusieurs îles australes et des îles marquises. Dans les îles non équipées de CET, nous recyclons notamment les bétons en les broyant et les concassant pour les mettre à la disposition des communes ou de la Région afin de constituer des sous-couches routières. Ce qui ne peut pas être recyclé est ramené sur l’île de Tahiti pour mise en CET. Nous recherchons toutes les solutions vertueuses de recyclage, particulièrement dans les îles éloignées. De même à Tahiti, pour ne pas surcharger les CET existants, nous sommes en contact avec toutes les start-up innovantes dans le recyclage et qui créent des produits distribués dans le commerce local.