
10 ans de prison et 4,5 millions d’euros d’amende pour les ”atteintes les plus graves à l’environnement au niveau national”. C’est ce que prévoit la création du délit d’écocide votée à l’Assemblée nationale ce samedi. Une disposition particulièrement attendue par les députés écologistes et les militants depuis le début de l’examen de la loi Climat. Mais au lieu de la notion de “crime” d’écocide qu’ils ont défendu becs et ongles, il sera bien décidé d’introduire le “délit” d’écocide. Une différence notoire.
“Plutôt qu’un grand pas, vous êtes en train de faire quelque-chose d’extrêmement dangereux, s’emporte Mathilde Panot, députée France Insoumise. Vous créez un dispositif totalement inapplicable et dangereux, qui va générer des débats juridiques à n’en plus pouvoir.”
Un délit d’écocide qu’on ne peut pas prouver
L’opposition dénonce l’exclusion de la négligence et de l’imprudence du champ d’application de cette loi.“Vous créez une double intentionnalité qui suppose que l’infraction soit commise de façon délibérée et avec la conscience du dommage causé à l’environnement”, précise la députée. Une intention qu’il sera bien difficile de démontrer devant un juge. De plus, les dommages causés doivent avoir des conséquences sur 10 ans pour que le délit d’écocide soit invoqué. “Mais est-ce que Lubrizol ou l’ Erika ont eu des effets sur dix ans ?”, interpelle Mathilde Panot.
D’une part, il semble quasiment impossible d’apporter la preuve que les dégâts causés à l’environnement vont s’étendre sur 10 ans. D’autre part, “au bout de dix ans, le délit est prescrit puisque la prescription est de six ans”, explique Corinne Lepage, ancienne ministre de l’Environnement, dans un article de Dalloz actualités. Le conseil d’État a même pointé un risque d’inconstitutionnalité et descendu le texte en flammes.
Cependant, le projet de loi Climat n’est pas encore adopté. Son examen par les sénateurs pourrait changer la donne.
Fanny Bouchaud