Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a évalué les engagements climatiques des 191 pays signataires de l’Accord de Paris. Il estime les actions climatiques insuffisantes et alerte sur un réchauffement « catastrophique » pour les prochaines décennies. En plus, 20 milliards de dollars manquent à l’appel pour atteindre l’objectif des 100 milliards.
Antonio Guterres, secrétaire général des Nations Unies, alerte sur un réchauffement « catastrophique » de 2,7 degrés d’ici la fin du siècle. C’est bien plus que les 1,5°C fixés par l’Accord de Paris en 2015. A six semaines de la COP 26, la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) a publié vendredi 17 septembre un rapport sur les engagements des 191 pays signataires.
Des engagements encore insuffisants
Ces analyses se basent sur les dernières contributions déterminées au niveau social, appelées NDC. Elles devaient être soumises par les pays signataires avant le 30 juillet 2021. Cependant, le rapport de la CCNUCC ne rapporte que les NDC revisitées de 113 pays. Et elles représentent moins de 49% des émissions mondiales. Les plans d’actions de ces derniers mèneraient à une diminution des gaz à effet de serre de 12% d’ici 2030 par rapport à 2010. Mais en prenant en compte l’ensemble des NDC – actualisées ou non – la tendance s’inverse. Les émissions mondiales augmenteraient alors de 16% en 2030 par rapport à 2010.
La tendance est catastrophique comme l’explique Antonio Guterres. En effet, pour espérer limiter le réchauffement à 1,5°C,il faudrait réduire les émissions mondiales de 40% d’ici 2030. « Il manque les NDC de pays industrialisés, tels que la Chine, l’Inde, l’Arabie Saoudite, le Japon, l’Afrique du Sud, liste Marine Pouget, responsable gouvernance internationale sur le climat de Réseau action climat. Ceux-là ont une importance capitale, autant que l’Union européenne ou les Etats-Unis ». Un retard dû à la gestion de la pandémie et de l’attente de moyens financiers. « Certains pays comme l’Inde se retrouvent coincés, explique l’experte. Tant qu’ils n’ont pas les promesses de finance climat par les pays pollueurs, ils ne rendent pas leurs NDC. C’est un moyen de faire pression », ajoute-t-elle.
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Les pays du G20 dans le viseur
Les pays du G20 sont les premiers pointés du doigts dans la responsabilité de ce réchauffement climatique accéléré. En 2009, lors de la conférence de Copenhague sur les changements climatiques, le G20 promettait 100 milliards de dollars d’ici 2020. Or, selon les derniers chiffres publiés par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), 20 milliards de dollars manquent pour atteindre cet objectif. « Les progrès limités des volumes globaux de financement climatique entre 2018 et 2019 sont décevants, en particulier à l’approche de la COP26, a déclaré Mathias Cormann, secrétaire général de l’OCDE dans un communiqué. Il est très probable que le financement du climat restera bien en deçà de son objectif. Il est nécessaire d’en faire davantage ».
Face à cette urgence, certains pays industrialisés renforcent leurs objectifs de réduction des émissions. « Ça commence à bouger, détaille Marine Pouget. Les Etats-Unis vont doubler leur finance climat et l’Allemagne a annoncé un plan plus ambitieux pour le printemps 2022″. Toutefois, l’experte précise que ce renfort n’est pas généralisé. « La France est par exemple très en retard et l’Union européenne reste assez discrète sur le sujet ».
Londres débloque une aide de 750 millions de dollars
Suite à la publication de ce rapport, une table ronde s’est tenue entre les dirigeants de plusieurs gouvernements à l’ONU, ce lundi 20 septembre. Boris Johnson a notamment exprimé sa « frustration » face aux promesses non tenues des pays développés sur la lutte du réchauffement climatique. Londres a annoncé débloquer une aide de 750 millions de dollars pour les pays en développement. Cette aide, en plus des 15 milliards alloués sur les cinq prochaines années, devrait permettre à des pays tels que l’Inde ou l’Afrique du Sud de mettre fin à l’utilisation du charbon, première ressource fossile responsable des émissions des hausses des températures. Toutefois, pour atteindre les objectifs initiaux des réductions d’émissions carbones, l’ONU insiste sur les responsabilités des pays développés. « Il est temps pour les dirigeants de prendre position et tenir leurs promesses, ou les populations dans tous les pays en paieront le prix » a déclaré Antonio Guterres.
Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) met lui aussi en garde contre la possibilité d’atteindre le seuil de 1,5°C autour de 2030 si les émissions mondiales ne diminuent pas suffisamment. Son rapport publié en août dernier précise que si des mesures ne sont pas prises à temps, les températures pourraient augmenter de 3,3 à 5,7°C. A ce stade, l’humanité serait menacée par de nouveaux désastres, tels que de fortes sécheresses, des précipitations abondantes, des canicules plus fréquentes et des saisons chaudes plus longues dans toutes les régions du monde.
Sophie Cayuela