Isolation des planchers bas et des combles, remplacement des menuiseries extérieures, protection solaire des parois vitrées… Avec l’accord de leur propriétaire, les locataires ont le droit d’entreprendre certains travaux de rénovation dans leur logement. Tour d’horizon de leurs droits et obligations avec Juliette Mel, avocate spécialiste en droit de l’immobilier.
La sobriété et la rénovation énergétique sont au cœur de la lutte contre le dérèglement climatique. Si le dispositif d’aides publiques MaPrimeRénov’ est réservé aux propriétaires, les locataires peuvent bénéficier de certaines primes énergie liées aux certificats d’économie d’énergie (CEE). Pour entreprendre ces travaux de rénovation, ils doivent toutefois demander l’accord de leurs propriétaires. Juliette Mel, avocate spécialiste en droit de l’immobilier au sein du cabinet M2J Avocats, explique à Natura Sciences les conditions à respecter.
Natura Sciences : Quels sont les droits des locataires, des propriétaires et des copropriétés par rapport à l’optimisation énergétique des bâtiments ?
Juliette Mel : Un locataire a le droit d’effectuer des travaux dans son logement. Pour savoir quelles sont les obligations auxquelles il doit répondre, il faut distinguer les travaux d’aménagement et les travaux de transformation du logement.
[Les travaux d’aménagement correspondent aux actions réversibles, notamment la décoration et les travaux n’impliquant pas de détérioration majeure. Les travaux de transformation désignent les ouvrages qui modifient la nature d’un logement de façon irréversible. Cela correspond, par exemple, à l’abattage d’un mur, l’agrandissement d’une porte ou l’ajout d’un escalier, NDLR.]
Ensuite, toutes les parties concernées par le bail doivent respecter la loi du 6 juillet 1989, ayant pour but de protéger locataires et propriétaires. Lorsqu’un locataire veut transformer son logement, l’accord écrit du propriétaire est nécessaire. Si celui-ci ne le donne pas , les travaux ne peuvent pas avoir lieu.
Cette règle est-elle immuable ?
Il existe une exception à la règle. En effet, la loi du 22 août 2021, destinée à la lutte contre le dérèglement climatique, introduit un régime dérogatoire d’autorisation tacite du bailleur lorsqu’il s’agit de travaux de rénovation énergétique. Un décret daté du 20 juillet 2022 liste les travaux de rénovation concernés. Il s’agit par exemple de l’isolation des planchers bas et des combles, du remplacement des menuiseries extérieures, de la protection solaire des parois vitrées ou opaques, ou encore de l’installation d’un système de ventilation.
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Concrètement, comment cela se passe-t-il ?
Comme pour tous travaux de transformation, le locataire doit envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception au propriétaire. Ce courrier doit mentionner précisément la nature des transformations envisagées. Il doit également désigner l’entreprise qui réalisera les travaux. Le propriétaire a deux mois pour y répondre.
En temps normal, une absence de réponse du propriétaire est synonyme de refus. Mais dans le cadre de la loi du 22 août 2021, sans nouvelle du propriétaire dans les deux mois, l’accord est considéré comme acquis. Dans ce cas, le bailleur ne pourra pas demander de remise en état à la fin du contrat de location.
Est-ce que les locataires ou les propriétaires ayant des projets de travaux peuvent se heurter aux décisions prises en assemblées générales de copropriétaires ? Le règlement de copropriété est-il contraignant ?
Les décisions prises lors de l’assemblée générale des copropriétaires sont contraignantes et s’appliquent exclusivement aux parties communes. Dès lors que l’on est dans le cadre de parties privatives, on n’a pas besoin de l’autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires. Mais dès que l’on sort de ce cadre, et que l’on est dans le cadre de parties communes, le règlement de la copropriété s’applique.
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Cela signifie que les possibilités travaux de transformation d’un logement dans un immeuble ne sont pas illimitées. Par exemple, si un locataire ou un propriétaire souhaite poser des volets roulants pour mieux isoler son appartement [et notamment améliorer le confort d’été, NDLR], il doit se référer au règlement de copropriété. Comme une telle modification aurait un impact sur la façade, la seule décision du locataire ou propriétaire ne suffit pas.