La spiruline séduit de plus en plus de Français. Bio ou non, produite en France ou importée, laquelle choisir ?
Avec une consommation totale estimée à environ 500 tonnes en France, la spiruline cultivée à l’étranger inonde le marché français. Et pour cause : la production française reste largement insuffisante pour répondre à la demande. La fédération des spiruliniers de France (FSF) représente entre 60 et 70 % des producteurs suivant les années, avec environ 130 adhérents, pour une production de près de 45 tonnes. La production française couvre donc autour de 15% de la demande. Et si vous cherchez à vous procurer de la spiruline biologique et française, sachez qu’elle reste encore plus rare.
Des engrais naturels ou de synthèse ?
Pour cultiver de la spiruline, il faut des engrais, beaucoup d’engrais. En France, pour produire 1 tonne de spiruline, les spiruliniers en consomment en moyenne 0,75 tonne. Vu les quantités en jeu, la question de l’origine des engrais et de leur production est donc capitale.
Le classement de la spiruline comme algue marine par le Règlement n°2021/1165 autorise uniquement l’utilisation d’azote minéral d’origine végétale pour la cultiver. Elle exclut donc de fait l’urée granulaire, l’engrais de synthèse le plus consommé dans le monde agricole, mais aussi – plus étonnant – les déchets agricoles tels que le fumier. Les seuls engrais disponibles aujourd’hui pour cultiver la spiruline bio sont fabriqués à partir de soja importé d’Amérique latine et de canne à sucre d’origine thaïlandaise, assure la FSF.
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De la spiruline bio étrangère ou locale?
La majeure partie des spiruliniers français ne franchissent pas le pas de la production de spiruline biologique. « Sur nos 130 adhérents, à notre connaissance, une dizaine produisent en bio et un est en conversion », assure Amandine Leruste-Calpena, chargée de mission Recherche et développement à la fédération des spiruliniers de France (FSF). Sauf mention explicite « Agriculture France » ou « Cultivée en France », la spiruline labellisée AB est donc en très grande majorité une spiruline d’importation.
La spiruline bio cultivée hors des frontières européennes est produite selon des cahiers des charges locaux. Les producteurs bénéficient ensuite de régimes d’équivalence pour la commercialiser en Europe. Résultat : « Aujourd’hui les produits importés de Mongolie, d’Inde, de Madagascar ou des États-Unis inondent le marché », regrette Amandine Leruste-Calpena.
Acheter local et français ou importer du bio ?
En France, la spiruline est produite dans des bassins sous serre, basée sur la reproduction des conditions naturelles de vie de la cyanobactérie. La spiruline se développe dans de l’eau douce enrichie en nutriments et en sels minéraux : azote, carbone, phosphore, potassium, magnésium, fer, oligo-éléments (zinc, cuivre, …). La chargée de mission Recherche et développement à la fédération des spiruliniers de France l’assure : « La spiruline française est écologique, car elle est cultivée de mars à octobre en conditions naturelles, le milieu n’est ni éclairé ni chauffé artificiellement. Sa culture nécessite uniquement les nutriments nécessaires au métabolisme de la spiruline. » Mais bien que la fédération veuille la présenter comme « écologique » , cela ne veut pas dire qu’elle soit « biologique », puisqu’elle est cultivée avec des engrais de synthèse.
Yannick Lopez est producteur de la spiruline de l’Essen’Ciel dans les Hautes-Alpes. Alors qu’il conduit le reste de sa ferme en agriculture bio et certifiée AB, il a fait le choix de ne pas se tourner vers la spiruline biologique. Lui qui produit environ 300 kg de spiruline dite « paysanne » par an explique son choix. « Nous sommes face à des aberrations : le soja ou la canne à sucre -qui sont avant tout des aliments – subissent un process industriel pour obtenir de l’azote minéral afin de répondre au cahier des charges bio. » Il lui préfère l’urée, un engrais minéral synthétique produit en Europe. « La seule différence entre une spiruline bio et paysanne, c’est l’origine de l’azote minéral… », assure-t-il. Si cette différence est tout de même de taille, ce n’est pas la seule. Les spiruliniers bio doivent en effet répondre à un cahier des charges et subissent des contrôles par un organisme certificateur.