Météo-France dévoile de nouvelles modélisations de l’évolution du climat français à l’horizon 2100. Et elles font craindre des températures extrêmes, jusqu’à +6°C l’été.
Météo-France prévoit une hausse des températures, des vagues de chaleur, des nuits tropicales et des sécheresses d’ici la fin du siècle. Ses nouvelles projections climatiques de référence exploitent une trentaine de simulations, en collaboration avec l’Institut Pierre-Simon Laplace et le Centre européen de recherche et de formation avancée en calcul scientifique pour le portail DRIAS. Ce dernier permet de visualiser de multiples indicateurs pour appréhender l’évolution du climat région par région. En particulier, il regroupe les échéances de projections futures en horizons : proche (2021-2050), moyen (2041-2070) et lointain (2071-2100). Les nouvelles projections mettent à jour celles élaborées en 2014. Elles reposent sur trois scénarios d’émissions de gaz à effet de serre.
Le scénario le plus optimiste (RCP 2.6) prévoit une baisse des émissions de gaz à effet de serre rapide pour atteindre la neutralité carbone vers 2070. Le scénario médian (RCP 4.5) repose sur une diminution des émissions à partir du milieu du siècle et une stabilisation des concentrations de CO2 dans l’atmosphère à environ 660 ppm en 2100, contre près de 415 ppm aujourd’hui. Dans le troisième, les émissions augmentent de manière ininterrompue et dépassent les 1370 ppm en 2100 (RCP 8.5). Ces résultats mettent à jour le précédent jeu de données, qui datait de 2014.
Un réchauffement sur toute la France
Avec un réchauffement mondial de 1°C déjà effectif par rapport à l’ère préindustrielle (soit avant le XIXème siècle), la France s’est réchauffée de plus de 1,5°C. Le réchauffement au milieu du siècle, puis d’ici 2100 dépendra énormément des émissions futures. Mais « les structures spatiales du réchauffement sont identiques dans les trois RCP avec un gradient nord-ouest/sud-est », note le rapport.
En moyenne annuelle, la hausse des températures atteindrait +1°C dans le scénario optimiste, +2,1°C dans le scénario médian et +3,9°C dans le scénario pessimiste par rapport à la période de référence 1976-2005. Par rapport à la période de référence, retenue, il faut ajouter encore 0,8°C pour connaître le réchauffement depuis l’ère préindustrielle. Dans le pire des scénarios, la température pourrait augmenter de 6°C l’été et de 4,4°C l’hiver.
Le portail DRIAS prévoit que l’augmentation moyenne des températures pour le milieu du siècle s’échelonnera de 1°C pour la façade Atlantique à 2°C pour les territoires plus continentaux. D’ici la fin du XXIe siècle, le scénario le plus pessimiste prévoit une augmentation moyenne annuelle comprise entre 3 et 4°C pour la façade nord-ouest, et entre 4 et 6 °C pour le reste du territoire.
Des vagues de chaleur qui s’intensifient
Sur la période de référence 1976 – 2005, les vagues de chaleur étaient relativement rares, avec une moyenne de l’ordre de 3 jours sur l’ensemble du territoire. Mais il faut s’attendre à une hausse de la fréquence et de l’intensité des vagues de chaleur. Jusqu’à 10 à 20 jours supplémentaires près des côtes de l’Atlantique et de la Manche et de 20 à 35 jours sur le reste du territoire dans le pire des scénarios, soit une augmentation d’un facteur 3 à plus de 10.
D’ici la fin du siècle, « l’augmentation de la fréquence du nombre de vagues de chaleur en été est fortement dépendant du scénario considéré : +10 à +15 jours en moyenne pour un scénario RCP4.5, environ le double en RCP8.5″, précise le rapport.
Des nuits tropicales jusqu’à 3 mois par an
Le rapport s’intéresse aussi à l’évolution des nuits tropicales, c’est-à-dire dont la température excède 20 °C. Alors qu’elles sont quasiment inexistantes dans le nord de la France et inférieures à 10 jours par an, excepté sur le pourtour méditerranéen, les vallées du Rhône et de l’Aude, elles vont se multiplier d’ici la fin du siècle. « Elles pourront revenir régulièrement en scénario RCP2.6, augmenter de 15 à 25 jours dans le scénario médian, hors zones les plus exposées, et 30 à 50 jours en RCP8.5″, observent les auteurs.
Dans le pire des scénarios, les zones les plus exposées pourront connaître jusqu’à 3 mois de nuits tropicales. Seules les zones de montagne et le littoral de la Manche resteraient quasiment épargnées. La situation pourrait être compliquée dès la moitié du siècle sur le sud de la France et dans les zones urbaines telles que Paris, Lyon et la vallée de la Garonne.
Pour les vagues de froid et des journées de gel, c’est l’inverse. « Le nombre de jours de vagues de froid ou de gelée est en baisse dans tous les scénarios avec une intensité dépendant fortement du scénario et de l’horizon temporel », prévient le rapport. En fin de siècle, le nombre de jours de vagues de froid pourrait être divisé par deux dans le scénario optimiste et se réduire à un jour par an pour les deux autres scénarios. « Les gelées pourront devenir un événement rare », note Météo-France.
Une pluviométrie incertaine
Les incertitudes sur l’évolution de la pluviométrie demeurent importantes. A l’échelle de la métropole, la pluviométrie devrait augmenter entre + 2 % et + 6 % selon les horizons et les scénarios. « Cette évolution connaît une forte modulation saisonnière avec une hausse systématique en hiver, souvent supérieure à +10 % et à l’inverse, une baisse quasi systématique en été, se renforçant au cours des horizons pour atteindre -10 à -20 % en fin de siècle avec les scénarios RCP4.5 et RCP8.5″, calcule le rapport.
Météo-France a toutefois du mal à prévoir l’évolution des précipitations extrêmes. Elles pourraient augmenter de +10% dans les régions les plus concernées par la hausse, notamment les frontières du Nord et Nord-Est et le littoral de la Manche.
Davantage de sécheresses et de vents forts
Les épisodes de sécheresses estivales augmentent peu dans le scénario optimiste. Toutefois, avec les scénarios RCP4.5 et RCP8.5, ils augmentent respectivement de l’ordre de 5 à 10 jours soit une augmentation de 30 à 50 %, d’ici la fin du siècle.
Enfin, Météo-France s’est intéressé à l’évolution des vents forts en France. L’incertitude demeure là encore assez élevée. « Les régions ayant une plus forte probabilité de renforcement du vent est le quart nord-est, voire la moitié nord, prévient Météo-France. À l’inverse, la probabilité la plus forte de diminution concerne la moitié sud et particulièrement le sud-ouest. »
Matthieu Combe