Cette semaine, les intempéries se sont abattues sur le Gard avec une rare violence. Pourquoi ces inondations? De telles intempéries vont-elles se multiplier? De façon plus violente? Dans d’autres régions de l’Hexagone ? Est-ce lié au dérèglement climatique? Olivier Proust, prévisionniste chez Météo France répond aux questions de Natura Sciences.
La vague orageuse s’est faite entendre dans la région, provoquant des chutes de pluies record et d’impressionnantes inondations. Heureusement, aucune victime n’est à déplorer, mais les dégâts sont considérables. S’ il est encore trop tôt pour les chiffrer, on peut déjà s’interroger sur les raisons d’une telle situation, et si elle pourrait rapidement se reproduire. Olivier Proust, prévisionniste chez Météo France revient avec nous sur cette épreuve climatique qui a ravagé le Gard.
Natura Sciences : Comment peut-on expliquer les inondations que connaît le Gard cette semaine?
Olivier Proust : Elles sont dues à un violent orage méditerranéen de grande échelle. Ces types d’orages très pluvieux et stationnaires sont dus à la configuration particulière de la Méditerranée, qui est très chaude au sortir de l’été. Les masses d’air qui circulent au-dessus de la mer sont alors humidifiées par la forte évaporation de cette eau, dont elles vont être gorgées. D’autre part, dans les couches d’air les plus basses, l’humidité et la chaleur sont telles que cela provoque des orages de grande échelle, fortement pluvieux. Ils vont alors s’auto-entretenir de façon stationnaire. Donc pendant trois heures, on a pu voir des trombes d’eau s’abattre sur la moitié sud du Gard. De plus, dans cette région, on se trouve sur un bassin versant, zone dans laquelle l’eau se déverse dans un cours d’eau assez petits, assez réactifs, qui vont monter très vite et déborder.
Existe-t-il un risque de voir se développer ce type d’orages ailleurs en France?
Ce type d’orages, comme on a pu le voir dans le Gard, est vraiment réservé au bassin méditerranéen car il faut une énorme alimentation maritime, avec une mer très chaude. Il faut aussi un relief proche de la mer, qui va conduire à constituer cet événement, donc les orages méditerranéens resteront méditerranéens. En revanche, plus l’air est chaud, plus il peut accueillir de l’eau, ce qui aura pour conséquence des précipitations plus fortes. C’est valable partout et on a pu en voir les conséquences dramatiques cette année à Beauvais, à Reims, en Allemagne ou en Belgique.
Le dérèglement climatique cause-t-il ces inondations?
Avec le dérèglement climatique, les populations méditerranéennes vivent au bord d’une marmite de plus en plus chaude au fil des années. Plus ça va chauffer, et plus les précipitations risquent d’être violentes. Le facteur de dérèglement climatique joue aussi sur d’autres phénomènes que sont les précipitations instables et extrêmes qu’on a connues vers Nîmes, Agen ou encore dans Nord-Est de la France cet été. Par ailleurs, on a souvent des sols de plus en plus bétonnés et urbanisés. Le drainage des précipitations devient bien moins efficace, il y a plus de ruissellement et d’accumulation d’eau. Un facteur aggravant, pouvant mener plus facilement à un épisode de forte pluie à une inondation.
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Doit-on s’attendre à plus de phénomènes de ce type à l’avenir? Plus violents?
Il y a déjà eu de violents épisodes de ce type dans l’histoire ancienne et récente. On ne va pas forcément avoir plus d’orages méditerranéens, car ce type de phénomène nécessite une certaine circulation atmosphérique, et aucune étude ne montre qu’elle subit une modification pour l’instant. La fréquence, et le risque de voir se former ce type d’orage devrait donc rester la même. Par contre, avec le changement climatique on a un air plus chaud, une mer Méditerranée plus chaude, et on assiste à une augmentation de la violence de ces phénomènes. Des événements d’une telle brutalité ont pu exister, mais pas aussi souvent.
Propos recueillis par Ouns Hamdi