L’étude OpinionWay réalisée pour l’entreprise PrimesEnergie.fr révèle qu’un Français sur cinq est climatosceptique. Si ce chiffre connaît une très légère baisse depuis 2019, la courbe mondiale tend plutôt à progresser.
Pas de doute : les récents sondages d’IPSOS confirment que la crise climatique compte parmi les principales préoccupations des Français. 72% d’entre eux se sont déclarés « inquiets » face au changement climatique. Et pourtant, malgré les rapports scientifiques et l’émergence de mouvements sociaux, les experts constatent un déni des enjeux environnementaux. « Il y a encore aujourd’hui un déni de gravité des enjeux et de l’urgence à agir », alertait Valérie Masson-Delmotte, paléoclimatologue et co-présidente du groupe de travail I du Giec, dans un entretien donné au journal du CNRS le 12 avril dernier. La nouvelle étude OpinionWay réalisée pour PrimesEnergie.fr confirme ce déni. À l’heure où les alertes sur la hausse des température se multiplient, le climatosceptisme résiste. Au total, un Français sur cinq serait climatosceptique selon l’étude, soit 21% de la population.
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Les climatosceptiques plus nombreux à l’échelle internationale
Au-delà d’un manque de conscience écologique, le chiffre donné par OpinionWay prend également en compte l’inaction pour le climat. « Non seulement 1 Français sur 5 ne croit pas au réchauffement climatique, mais parmi les autres, la moitié ne semble pas prendre la mesure du défi qui nous attend », indique Nicolas Moulin, fondateur de PrimesEnergie.fr dans un communiqué. Ce chiffre est toutefois en baisse par rapport au même sondage réalisé par OpinionWay en mars 2019. Cette année là, 23% des interrogés affirmaient ne pas croire au réchauffement climatique.
Néanmoins, si la part de climatosceptiques en France semble diminuer, elle augmente au niveau mondial. En décembre 2021, l’institut de sondage IPSOS témoignait de la progression du climato-scepticisme. 31% de la population mondiale était climatosceptique en 2019, mais 34% en 2021. « La part de climatosceptiques augmente au niveau mondial, ce qui montre qu’il n’existe pas de lien systématique entre la survenue de ces événements et la prise de conscience de l’origine humaine du changement climatique ou de sa réalité même« , avait déclaré à cette occasion Brice Teinturier, directeur général délégué Ipsos France.
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Le Nord-Ouest plus touché par le climatosceptisme
Au cours des derniers mois, les alertes se sont pourtant multipliées, les phénomènes météorologiques extrêmes aussi. Mais ces dérèglements, tels que les inondations, les épisodes de sécheresse ou les feux de forêts ne semblent pas impacter l’opinion des climatosceptiques. Selon l’étude, les habitants du Sud-Est, particulièrement touchés par ces phénomènes, sont 18% à ne pas croire au réchauffement climatique. Une proportion qui grimpe à 26%, soit plus d’un Français sur 4 dans le Nord-Ouest du pays.
L’étude expose par ailleurs des différences particulièrement sensibles selon la région de résidence des climatosceptiques. La majorité d’entre eux (25%) vit dans des communes de 2 000 à 20 000 habitants, contre 20% dans les zones rurales et 18% en région parisienne. Le sondage IPSOS précisait qu’une partie des climato-sceptiques (32%) n’« a pas le sentiment de voir les effets du changement climatique dans sa région, contre seulement 11% chez les convaincus ».
Le critère de l’âge
Outre la région, le critère de l’âge se révèle être le plus déterminant dans l’étude réalisée par OpinionWay. Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce ne sont pas les plus âgés qui sont les plus climatosceptiques. L’étude note des écarts de 15 points entre les plus climatosceptiques (29% des 35-49 ans) et les moins climatosceptiques (14% des plus de 65 ans). Ces différences s’observent également au sein des générations. 71% des 35-49 ans mettent d’autres sujets au cœur de leurs priorités. Les 18-25 ans ne seraient pour leur part que 52% à choisir d’autres priorités, soit près de 20 points d’écart.
En décembre dernier, l’IPSOS constatait au contraire que l’âge ne faisait pas partie des critères principaux. Le critère majeur concernait le niveau de revenus. « Le choix de l’environnement est plutôt celui des catégories favorisées et éduquées, rapporte le sondage. Contrairement aux idées reçues, les jeunes ne sont pas plus pro-environnement ou en faveur de la décroissance que leurs aînés ». IPSOS précise toutefois que les moins de 25 ans le sont un peu plus en Europe : « il serait abusif de les décrire comme une génération plus en colère« , indique Brice Teinturier.
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« Opposer la lutte pour le climat aux enjeux sociaux est un contresens total »
Et pourtant, si la crise climatique ne représente pas une priorité pour les climatosceptiques, 75% des interrogés considèrent qu’il est « possible de concilier lutte pour le climat, croissance économique et mode de vie des pays développés en réalisant des économies d’énergie ». Les 25% restants ne semblent pas lier dérèglement climatique et thématiques sociales. « Opposer la lutte pour le climat aux enjeux sociaux est un contresens total. Le niveau de réchauffement sur lequel nous pouvons agir aujourd’hui va totalement conditionner l’ensemble des autres sujets jugés plus prioritaires par la majorité des Français« , a réagi Nicolas Moulin.
Cette étude intervient alors que les sujets climatiques représentent une faible part des débats électoraux en France. Et ce, malgré les nombreuses alertes à l’échelle internationale.« Les climatologues avertissent que nous sommes déjà dangereusement proches de points de basculement qui pourraient entraîner des impacts climatiques en cascade et irréversible », a déclaré Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU le 4 avril dernier lors de la publication du troisième volet du rapport du Giec. Le texte précisait qu’il fallait agir dès maintenant et durant les trois prochaines années pour réduire les émissions mondiales et conserver un monde vivable.