Petit-déjeuner, déjeuner, dîner, qui oserait remettre en cause le sacro-saint triptyque qui organise notre alimentation ? Les instants où nous mangeons rythment notre journée. Mais nous alimentons-nous par besoin ou par habitude ? Savons-nous faire la différence entre les réels besoins de notre corps et la routine alimentaire culturellement acquise? Docteurs et nutritionnistes se sont penchés sur cette question.
« Mange comme un roi le matin, comme un prince le midi, comme un pauvre le soir. » Qui n’a jamais entendu ce type de recommandation qui relève plus du conseil de grand-mère que de l’avis médical ? Quels qu’ils soient, nos régimes alimentaires répondent à des habitudes culturelles. Et ces dernières sont parfois piégeuses pour notre organisme, et nous font confondre vraie et fausse faim. Une confusion d’autant plus facile que manger est très souvent synonyme de plaisir. Selon une étude IPSOS/INTERBEV, 82% des Français considèrent que les repas servent « à se faire vraiment plaisir ». En revanche, le fait que les repas puissent permettre de préserver la santé n’est reconnu que par 76% des sondés.
L’appétit prévisionnel, ou manger par habitude
Cette notion de plaisir et les rythmes alimentaires contribuent à expliquer pourquoi parfois on mange sans réelle faim physiologique. L’expérience menée au XIXème siècle par le scientifique russe Ivan Pavlov sur le chien permet de le comprendre. Cette démonstration montre qu’un chien salive au son d’une cloche s’il a été habitué à entendre ce bruit lorsqu’on lui donne à manger. Par analogie, cela peut expliquer pourquoi on a faim le matin par exemple, si on a été habitué à toujours prendre un petit-déjeuner. C’est une faim qui ne reflète pas directement les besoins de l’organisme. Elle est appelée « appétit prévisionnel » par le nutritionniste Jean-Philippe Zermati.
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Or, en multipliant les repas, le corps n’a pas le temps de digérer convenablement. De l’ingestion à l’excrétion, le processus alimentaire peut mettre jusqu’à douze heures. Un temps dans lequel il est très courant que nous mangions encore. Cette envie de manger qui relève de l’émotionnel nous pousse à consommer des aliments qui nous font plaisir, qui sont souvent gras et sucrés. Un comportement alimentaire qui peut être à l’origine d’une prise de poids accrue, et causer des troubles pour la santé. C’est pourquoi il est essentiel de (ré)apprendre à différencier l’envie et le besoin de manger, pour rééquilibrer son alimentation.
Manger moins pour reconnaître la sensation de faim
Ainsi, faire un jeûne – éventuellement intermittent – pourrait permettre à l’organisme de fonctionner plus tranquillement. « Se priver de nourriture durant 12 à 16 heures offre une pause bienfaisante à l’organisme. Digérer nécessite beaucoup d’énergie ! Un jeûne court laisse le temps aux organes digestifs de traiter et d’éliminer le contenu des repas précédents. Du coup, on se sent tout de suite plus léger et plus en forme, le teint s’éclaircit et les paramètres sanguins s’améliorent » expliquait le docteur Frédéric Saldmann à Santé Magazine. Un avis que partage le médecin-nutritionniste Patrick Serog : « faire deux repas par jour n’est pas néfaste ».
Pour les novices, il est important d’y aller progressivement. Le corps peut avoir besoin de temps pour s’adapter à ce nouveau rythme alimentaire. Ainsi, commencer par un jeûne de douze heures est un bon début. Pour cela, il faudrait manger entre 8 heures et 20 heures. Une telle pratique pourrait nous aider à ressentir la faim physiologique, la vraie faim. Mais il faut veiller à ne pas compenser le jeûne par des prises alimentaires compulsives ou en trop grandes quantités. Notons également qu’il ne doit pas être pratiqué sans précaution. Les personnes diabétiques et les femmes enceintes doivent demander l’avis d’un médecin avant de le pratiquer. Cela vaut également pour les personnes malades.
Auteur : Chaymaa Deb, journaliste du magazine Natura-sciences.com