Ce week-end de Pâques, plusieurs centaines de militants d’Extinction Rebellion occupaient la Porte Saint-Denis à Paris pour dénoncer l’inaction climatique des dirigeants. Reportage.
Samedi matin vers 9h45. Quelques centaines de militants d’Extinction Rebellion France et de groupes locaux prennent rapidement possession de la Porte Saint-Denis, dans le 2e arrondissement de Paris. Ils installent rapidement une barricade faite de bottes de foin, et bloquent la circulation sur les boulevards de Bonne-Nouvelle et Saint-Denis, ainsi que les rues Saint-Denis et Faubourg Saint-Denis. Cette action, ils l’appellent « l’inévitable rébellion ». L’objectif : dénoncer, entre autres, « l’inaction » des dirigeants face au réchauffement climatique.
Les heures passent et les revendications des militants sont claires. La vitrine du magasin Sephora situé à la sortie du métro Strasbourg Saint-Denis en est la preuve. Aux yeux de ces activistes très critiques à l’égard du capitalisme, l’enseigne spécialisée dans la cosmétique est un symbole. Futilité, consumérisme à outrance, aux antipodes des enjeux sociétaux et environnementaux de notre temps. En plein jour, sous les yeux des badauds, un militant se saisit d’une bombe de peinture noire. Il inscrit « Stop oil », « stop au pétrole », matière largement utilisée dans le secteur du maquillage. Le message recouvre les trois quarts de la vitrine. On doit pouvoir le lire de loin.
Arm-lock pour défense
Sur le bitume, les bloqueurs assis par terre remplacent les voitures. Pendant plusieurs heures, ils se relaient pour laisser le temps aux autres militants d’installer l’occupation. Ils forment des chaînes humaines et pratiquent la technique du « arm lock ». D’autres font face aux cars de CRS, éloignés de cinq à dix mètres, en méditant. Quelques CRS et policiers font des repérages au cœur de l’événement. À chaque passage, un guetteur court prévenir les militants. « Ça monte, arm lockez-vous », crie-t-il. Et les activistes arrivent à leurs fins. Samedi vers 18h, les cars de CRS avaient abandonné les lieux, laissant les militants libres d’occuper la place comme ils l’avaient imaginé jusqu’à lundi soir.
Contre l’inaction climatique
Durant tout le week-end de Pâques, environ 1.500 rebelles ont occupé la place, estime Extinction Rebellion. Ils ont appelé à « réinventer la démocratie » et à faire en sorte « que l’écologie soit remise au centre du débat », explique Chalou, militante d’Extinction Rebellion depuis deux ans. « On ne peut pas se satisfaire d’un entre-deux-tours où on a le choix entre des solutions extrémistes avec des discours de haine et de l’autre côté un candidat qui n’a absolument rien fait pour le climat pendant 5 ans », poursuit-elle.
Et d’ajouter : « Quand l’état nous met en danger, il est de notre devoir de nous rebeller. Il faut continuer la lutte, c’est une question de l’avenir de notre génération. On est déçu, mais on est déterminé et on ne lâchera rien. »
Agora aux activités multiples
L’occupation se déroule dans une ambiance festive et détendue avec l’apparition de tentes, de pianos, de hamacs, de fanfares. Des militants profitent du soleil, pendant que d’autres dansent. Au soleil, un espace de conférences s’installe devant la Porte Saint-Denis construite en 1672.
Tables rondes, concerts, projections de films, causeries, yoga, séances de méditations, apéritifs se succèdent pour discuter des solutions, imaginer un nouveau récit et se rassembler.
Lundi soir, un certain nombre de citoyens et citoyennes de divers horizons et collectifs, dont des rebelles d’Extinction Rebellion, ont manifesté leur désir de rester en leur nom propre. Dès lors, la suite sort du cadre de l’action d’Extinction Rebellion et devient autonome.
« Que des personnes aient décidé de s’en emparer fait partie de l’exercice, nous n’avons pas à le juger, juste à espérer que se maintienne cette énergie de partage et de solidarité non-violente qui a prévalu pendant ces trois jours », réagit Extinction Rebellion. Affaire à suivre… En 2019, Extinction Rebellion avait occupé pendant plusieurs jours la Place du Châtelet à Paris.
