37% des entreprises les plus liées à la déforestation n’ont aucun engagement public contre ce phénomène, selon Global Canopy. Dans son dixième rapport annuel “Forest 500”, l’ONG revient sur une décennie de données sur la déforestation et sur le rôle des entreprises liées à ce phénomène.
En 2023, plus d’un tiers des 500 entreprises les plus liées à la déforestation dans le monde n’ont pris aucun engagement public contre ce fléau. Ce 27 février, Global Canopy, une « ONG axée sur les données qui cible les forces du marché détruisant la nature », a publié son dixième rapport annuel “Forest 500”. Ce dernier « suit les politiques et les performances des 350 entreprises les plus influentes et des 150 institutions financières les plus exposées au risque de déforestation dans leurs chaînes d’approvisionnement et leurs investissements ».
Dix ans après la New York Declaration on Forests, où les dirigeants mondiaux ont endossé « un calendrier mondial pour réduire de moitié la perte de forêts naturelles d’ici 2020 et s’efforcer d’y mettre fin d’ici 2030″, et peu après ceux de la COP28, les grandes entreprises ne font toujours pas leur part. Sous-titré “une décennie de données sur la déforestation”, le rapport présente également les dix “leçons” tirées de cette décennie par l’ONG ainsi que des recommandations pour les cinq prochaines années.
Des résultats en demi-teintes
D’après Global Canopy, seulement 1% des entreprises sont sur « la bonne voie » par rapport aux futures réglementations. Par exemple, dès 2025, l’Union européenne mettra fin à l’importation des produits issus de terres déboisées. De même, les accords signés durant la COP28 soulignent la nécessité d’accentuer les efforts pour stopper la déforestation d’ici 2030. Selon Emma Thompson, la principale autrice du rapport, cette nouvelle loi européenne constitue une « étape positive ». Elle déplore cependant le retard de nombreux autres pays sur ce sujet. Le rapport cite dans ces bons élèves quelques marques, comme les géants du luxe français LVMH et Kering.
Selon le rapport, 63% des entreprises ont, au minimum, un engagement public. Mais pour Global Canopy, prendre des engagements n’est pas suffisant. En effet, la plupart de ces entreprises n’ont pas « fourni de preuve suffisante de leur mise en œuvre ». Global Canopy cite par exemple les marques Adidas, Starbucks et Gap. Le rapport de l’ONG précise que seules 6% des entreprises « avec un engagement contre la déforestation ont montré des preuves adéquates de leur mise en œuvre pour toutes les marchandises à haut risque ».
37 % des entreprises n’ont aucun engagement public
En 2023, 37% des 500 entreprises étudiées, n’ont « aucun engagement public » pour mettre fin à la déforestation, contre 40% en 2022. Plus précisément, cela concerne 104 des 350 entreprises consommatrices de matières premières liées à la déforestation. Ces matières premières sont, par exemple, le bois, l’huile de palme, le papier ou le cuir. Cela concerne aussi 83 des 150 institutions financières subventionnant le plus ces activités.
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Parmi ces compagnies, le rapport cite par exemple, « le plus grand fabricant de chaussures européen, Deichmann Group ». Contacté par l’AFP, l’entreprise se dit « surprise » de figurer dans le rapport. En effet, celle-ci affirme « ne pas se fournir en matières premières dans des pays liés au sujet de la déforestation ». “Le groupe affirme ‘travailler avec ses fournisseurs’ sur le cuir, mais le code de conduite régissant ces contrats ne mentionne pas explicitement la déforestation”, précise l’AFP.
Un rapport tourné vers l’avenir
Aux côtés de cette rétrospective décennale, Global Canopy s’intéresse à l’avenir. Parmi les dix leçons tirées, l’ONG note plusieurs mesures à appliquer afin d’endiguer la déforestation. « L’action volontaire [des entreprises] a échoué », a déclaré Emma Thompson à l’AFP. L’autrice appelle à une « régulation forte » avec des « critères clairs sur la déforestation et les droits humains » souvent menacés dans les territoires concernés. Il faut aussi exiger de la « transparence » des entreprises et que les règles s’appliquent au secteur financier, préconise-t-elle.
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Global Canopy note également que les actions prises par des entreprises comme LVMH ou Kering montrent qu’un « progrès rapide est possible ». « Pour garantir un avenir viable, le monde ne peut pas supporter une autre décennie de progrès limités. C’est la décennie critique pour l’humanité. Pour éviter des conséquences catastrophiques, nous devons observer des progrès significatifs au cours des cinq prochaines années. Avec seulement quelques années restantes pour atteindre l’objectif d’arrêter et d’inverser toute la déforestation d’ici 2030, la COP30 en 2025 sera un moment décisif », affirme l’ONG dans son rapport.