Le programme « International Ocean Discovery Program » (IODP) est l’un des plus importants programmes de recherche en géosciences marines au monde. Depuis 2013 et jusqu’en 2023, il s’intéresse notamment aux changements climatiques et environnementaux, aux aléas et aux risques naturels et anthropiques et à la biomasse cachée.
« Avec des navires foreurs modernes, équipés de technologies de recherche de pointe, nous mettons l’accent sur quatre thèmes de recherche : les changements climatiques et océaniques, les limites de la vie sous le plancher océanique, les processus profonds de l’intérieur de la Terre et leurs impacts à la surface de la Terre ainsi que les processus à l‘origine de risques majeurs aux échelles de temps humain », explique Keir Becker, le président du Forum IODP.
Dans le cadre de ces recherches, les forages vont actuellement jusqu’à 240 m en dessous du plancher océanique, mais l’objectif est d’atteindre des profondeurs allant jusqu’à 6 km. En plus de la récolte d’échantillons, des capteurs de température et de pression sont placés dans des points d’intérêt. Les Japonais ont, par exemple, installé des capteurs dans le plancher océanique d’où est parti le tsunami de 2011.
Des carottes qui en disent long sur le réchauffement climatique
Concernant le climat et le l’influence du changement climatique sur les océans, le but est d’analyser les sédiments profonds de l’océan qui constituent de véritables archives du climat terrestre. Ces recherches permettront de réduire les incertitudes des modèles climatiques pour prédire les futurs changements climatiques. Par l’analyse des sédiments déposés il y a des dizaines de millions d’années, lorsque les teneurs en CO2, de l’atmosphère et les températures étaient beaucoup plus élevées qu’aujourd’hui, il sera possible de mieux comprendre le système climatique. Dans cette perspective, l’Arctique apparait comme un territoire de choix.
L’objectif est notamment de mieux évaluer la sensibilité du climat mondial et des écosystèmes océaniques à des niveaux plus élevés de gaz à effet de serre et de mieux évaluer la hausse du niveau des mers due à la fonte des glaces. Les missions permetent également de mieux évaluer comment l’impact du réchauffement climatique sur l’océan peut modifier les précipitions régionales, la distribution et la fréquence des ouragans. Enfin, les études fourniront de nouveaux éléments pour comprendre comment l’océan réagit à une augmentation de l’acidité, des nutriments et d’autres modifications chimiques.
Plus globalement, les recherches ont pour objectif de comprendre les mécanismes contrôlant les fréquences des tremblements de terres, glissements de terrains et tsunamis dévastateurs.
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Un consortium international
Dans le cadre d’IODP, trois bateaux et plateformes de forage permettent aux chercheurs du monde entier d’accéder à une vaste carothèque publique, riche de données géologiques, biologiques et environnementales prélevées dans le plancher océanique. Le programme des expéditions à venir est chargé et permettra de nourrir encore cette base de données.
Comme précédemment, le nouvel IODP réunit des scientifiques des États-Unis, du Japon, de l’Europe et du Canada, ainsi que des membres associés (Chine, Corée du Sud, Australie, Inde et Brésil). Depuis 2003, 17 pays européens et le Canada sont réunis sous l’égide du Consortium européen ECORD (European Consortium for Ocean Research Drilling). Il opère les expéditions nécessitant d’autres plateformes que les navires d’IODP pour remplir les objectifs du programme.
ECORD essaye d’organiser une expédition chaque année. « Ces expéditions sont spécifiques, en ce sens que nous allons explorer des régions océaniques où les navires foreurs américain et japonais, JOIDES Resolution et Chikyu, ne peuvent pas fonctionner, comme par exemple dans l’Arctique englacé et dans les eaux antarctiques. Ces régions jouent un rôle majeur dans le changement climatique mondial. Cependant, nous manquons de données du fait que jusqu’à présent seules quelques expéditions de forage ont pu être effectuées dans ces régions hostiles » explique Gilbert Camoin, directeur de l’agence de gestion d’ECORD.