Les eaux non gelées de l’Océan Arctique sont polluées par les micro-fragments de plastique. Une étude internationale publiée le 19 avril dans Science Advances confirme l’existence d’une zone d’accumulation de plastiques jusque là soupçonnée mais non découverte.
Les déchets plastiques s’accumulent dans les 5 gyres : Atlantique nord et sud, Pacifique nord et sud, océan Indien. Ca, on le sait depuis plusieurs années. Autour du globe, la pollution par les plastiques flottants à été estimée en 2015 à près de 270.000 tonnes. On sait aussi que la Méditerranée et les côtes sont polluées par des tonnes de micro-fragments de plastique. Cette nouvelle étude confirme que la pollution s’étend même jusqu’à l’Océan Arctique.
Les plastiques s’accumulent jusqu’en Arctique!
Bonne nouvelle: la majorité des eaux arctiques contient peu de fragments de plastique. Mauvaise nouvelle: les chercheurs ont trouvé une zone au nord des mers du Groenland et de Barents en présentant des teneurs relativement élevées. Les concentrations maximales de plastique flottant mesurées dans ce secteur sont néanmoins beaucoup plus faibles que celles trouvées dans les gyres. Le maximum est de 320.000 fragments/km2 dans la zone d’accumulation arctique, contre 1,3 million/km2 dans les gyres. Néanmoins, les valeurs médianes sont similaires, notamment en nombre de particules : 63.000 fragments/km2 pour 65 g de plastique par km2 en Arctique, contre 44.000 fragments pour 180 g/km2 dans les autres zones.
Les chercheurs estiment que l’Océan Arctique contiendrait déjà entre 100 et 1.200 tonnes de plastiques flottants. L’estimation moyenne se situe à 400 tonnes, constituées de 300 milliards de fragments. 95% de ces fragments de plastique se concentrent dans la zone d’accumulation des mers du Groenland et de Barents. Vu que la majorité du plastique déversé dans les océans coule, l’étude estime que des quantités importantes de déchets plastiques doivent déjà polluer les fonds océaniques de l’Arctique.
Une majorité de petits fragments de plastique
Les fragments en Arctique sont plus petits et moins lourds que dans les autres zones d’accumulation. Par rapport aux autres zones d’accumulation de débris flottants, l’Océan Arctique présente une faible abondance de fragments supérieurs à 12,6 mm.
La photodégradation et la fragmentation des débris plastiques flottants dépend du temps d’exposition dans l’environnement. La présence majoritaire de petits fragments confirme donc que le plastique trouvé en Arctique a été introduit dans les océans depuis un certain temps. Par ailleurs, les chercheurs pensent que les cycles de gel/fonte de la mer aux hautes latitudes peut accélérer la fragmentation des plastiques.
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Du plastique transporté d’Atlantique Nord vers l’Arctique
La taille des fragments et leur typologie suggère qu’ils sont issus de sources éloignées. Les modèles de circulation de surface et les données de terrain montrent que la branche polaire de la circulation dite « thermohaline » transfère des débris flottants de l’Atlantique Nord aux mers du Groenland et de Barents. Celles-ci formeraient un cul-de-sac favorable à l’accumulation des débris flottant.
Ces micro-fragments flottants ne sont donc pas majoritairement produits par la faible population locale. Une petite partie provient de l’augmentation de l’activité maritime dans cette zone. Mais la plupart est transportée par les courants océaniques à grande échelle. Elle est issue du gyre de l’Atlantique Nord, de la côte est des États-Unis, des côtes du nord-ouest de l’Europe et du Royaume-Uni. La zone d’accumulation située en Arctique se nourrit donc du plastique libéré à des latitudes plus basses.
Ces résultats découlent de l’exploitation des données issues de l’expédition Tara autour de l’Océan Arctique en 2013. La goélette Tara a réalisé des prélèvements de microplastiques sur 42 sites autour du bassin Arctique pendant cinq mois. Des filets Manta ont été tirés à 15 cm de profondeur pendant 20 minutes pour prélever les fragments supérieurs à 0,3 mm.
Auteur : Matthieu Combe, fondateur du webzine Natura-sciences.com