Réparti autrefois sur la majeure partie du continent africain, le lion est aujourd’hui retranché dans les zones protégées (réserves, parcs nationaux et territoires limitrophes). Hors de ces zones, la situation est dramatique.
En Afrique centrale et occidentale, le lion est en déclin même dans les zones protégées, et a quasiment disparu ailleurs excepté au sud du Tchad et au nord de la République centrafricaine. En Afrique orientale, les populations sont à peu près stables, encore que le braconnage et les chasses illicites (dans certaines réserves de chasse, un même permis sert plusieurs fois…) soient parfois redoutables, favorisés par la corruption. Même au Kenya, où l’importance du tourisme a favorisé une répression très sévère contre le braconnage, il arrive qu’on « vole » des lions dans les réserves pour les transférer clandestinement vers des micro-réserves de chasse. Dans le sud de l’Afrique, où le lion avait été pratiquement exterminé, on a réintroduit plus de 350 individus répartis dans 21 réserves. Ce sont des populations faibles, isolées, à faible pouvoir d’expansion et de renouvellement génétique.
Les conflits entre le lion et les éleveurs de bétail sont actuellement la plus grave menace qui pèse sur l’espèce. Les lions sont littéralement persécutés dans les nombreuses régions pratiquant l’élevage du bétail, et ceci jusqu’aux portes des zones protégées : chasse au fusil, pièges à mâchoires et empoisonnement de carcasses ont décimé ou fragilisé gravement la plupart des populations de lions vivant en dehors des réserves.
Concernant les attaques contre l’homme, il convient de distinguer les accidents fortuits, souvent lié à une imprudence de l’homme, des lions au comportement déviant qui commettent des attaques répétées, en prennent l’habitude et peuvent être qualifiés de « mangeurs d’hommes ». Il est évident que des lions qui ont perdu la peur de l’homme et pris l’habitude de l’attaquer sont très dangereux et le restent même s’ils sont transférés dans un parc national. L’abattage sélectif de tels animaux déviants est inévitable.
Une autre menace à laquelle les lions doivent faire face est la réduction de leur habitat et de la disponibilité des proies. Même si l’espèce a une grande faculté d’adaptation, l’extension des terres agricoles et des activités humaines ne cesse d’empiéter sur le territoire des lions et de le fragmenter, multipliant par là-même les risques de conflits.
Un certain nombre de maladies ont eu de graves conséquences pour les lions, chez lesquels la propagation est facilitée par les mœurs sociales. En 1993-94, la maladie de Carré a décimé un peu plus de 1 000 lions, soit 35 % de la population du Serengeti-Masai Mara. La maladie avait pour origine et réservoir les chiens des villages adjacents. Des complications infectieuses suite aux piqûres de la Mouche charbonneuse Stomoxys ont également tué beaucoup de lions, notamment au Ngoronroro en 1962, ainsi que l’association du virus de la maladie de Carré avec une maladie transmise par les Tiques (2001). En Afrique du Sud, la récente propagation de la tuberculose bovine pourrait avoir des conséquences dramatiques sur les populations de lions. En revanche, d’autres maladies virales pour lesquelles les lions présentent un fort taux de séropositivité (FIV, herpès félin, calicivirus, parvovirus, coronavirus) ne semblent pas avoir d’influence notable sur la mortalité globale.
Le lion est inscrit en annexe 2 de la CITES, c’est-à-dire que son commerce international est réglementé. La chasse aux trophées est autorisée, sous réserve de respecter des quotas, dans 13 pays de l’aire de répartition soit 40 %. Malheureusement, beaucoup de lions sont abattus en violation des quotas, certaines voies de corruption permettant d’utiliser plusieurs fois le même permis. Il est vrai qu’en contrepartie, les sommes versées pour le droit de chasse sont partiellement utilisées dans la conservation et que les effets négatifs de la chasse sur les populations de lions sont controversées. Mais il ne faut pas négliger les effets indirects : à chaque fois qu’un mâle dominant est abattu, un autre mâle vient s’approprier le groupe et tue systématiquement les lionceaux.
Le lion est inscrit dans la catégorie « vulnérable » sur la Liste rouge de l’UICN. Mais il est considéré comme « menacé » en Afrique occidentale où il ne subsisterait que 850 individus. Globalement, les effectifs ont chuté d’environ 30 % durant ces deux dernières décennies. Si l’on fait la synthèse des études récentes visant à évaluer les effectifs actuels du lion, on se situe entre 30 000 et 40 000 individus (dont 60 % dans les zones protégées) contre 200 000 en 1975 et 400 000 en 1950. Le lion est classé par le WCS comme un des carnivores les plus menacés d’Afrique.
A quoi ressemble un lion ?
Les lions, panthera leo, mesurent jusqu’à 1,85 m de long pour 1 m de hauteur au garrot. Les femelles sont plus petites et de formes plus légères que les mâles. Les femelles pèsent de 120 à 180 kg, les mâles de 160 à 220 kg.
Les mâles portent une crinière qui commence à pousser dès l’âge de 20 à 24 mois, mais atteint son plein développement à trois, quatre ou même cinq ans. La crinière est blonde à fauve au départ, puis tend à noircir avec l’âge. De manière générale, les lions des montagnes et des régions fraîches tendent à être plus grands et à avoir des crinières plus fournies et plus sombres que ceux des régions chaudes. Certains ont une crinière très réduite, voire absente, notamment dans les régions très chaudes à végétation épineuse dense.
Les lionceaux ont un pelage laineux et des oreilles proportionnellement plus grandes que les adultes. Ils sont marqués de taches brunes qui disparaissent progressivement à partir du sevrage, mais dont les traces peuvent persister longtemps sur les parties inférieures du corps et les membres.
Où vivent les lions ?
Sur la plupart des cartes, on voit l’aire de répartition actuelle du lion englober une grande partie de l’Afrique au sud du Sahara, hormis la forêt équatoriale. En fait, il a totalement disparu de larges portions de cette zone et sa présence est sporadique ailleurs sauf dans les zones protégées. Savanes ouvertes ou légèrement boisées, brousse avec d’épais taillis, zones semi-désertiques avec buissons et enrochements. On le rencontre jusqu’à 3 000 m d’altitude, voire près de 4 000 m au Kenya et en Éthiopie.
Comment vivent les lions ?
Le lion est le plus sociable des félins, il vit en groupes pouvant aller jusqu’à 30 individus. Ce sont le plus souvent les femelles qui chassent, les mâles ayant la charge de protéger le territoire contre les intrus et notamment les mâles concurrents. À condition que les proies soient en nombre suffisant, les femelles résident toute leur vie sur le territoire de leurs mères. Par contre, les mâles subadultes doivent quitter le groupe lorsque leur père commence à les considérer comme des rivaux potentiels. Ils mènent une vie nomade jusqu’à ce qu’ils trouvent un territoire et un groupe à conquérir, souvent au prix de combats d’une extrême violence avec le mâle dominant. L’ample et puissant rugissement du lion, qu’on peut entendre à plusieurs kilomètres par vent favorable, joue un rôle dans l’affirmation territoriale. Le volume de la crinière participe à l’établissement de la hiérarchie entre mâles, tout en assurant une protection contre les morsures qu’ils s’infligent lors des combats. Lorsqu’un mâle est vaincu, il est généralement chassé par le nouveau dominant qui s’empresse de tuer les jeunes du groupe afin d’assurer sa propre descendance. Les vieux mâles ainsi évincés mènent souvent une vie solitaire, et finissent parfois sous les crocs des hyènes lorsque leurs forces déclinent.
Les lions chassent surtout la nuit, mais sont plus diurnes que les autres félins. Ils passent les heures les plus chaudes à dormir dans d’épais taillis ou sous des arbres dans lesquels les adultes grimpent rarement, à part dans quelques régions (Manyara et Tarangire, en Tanzanie) où ils grimpent parfois sur les branches basses pour y dormir à l’abri (relatif) des mouches Tsé-Tsé. Les proies favorites du lion sont les zèbres et les grandes antilopes (gnous, bubales, damalisques, oryx), mais il leur arrive d’attaquer des gazelles, impalas, autruches, phacochères, voire même crocodiles et serpents. Ils essaient de s’en prendre aux éléphanteaux dans certaines régions, et sont capables de tuer une girafe ou un buffle adulte s’ils sont en groupe important. Les lionnes s’approchent le plus possible, rampant au ras du sol, quelques-unes rabattent la victime choisie vers d’autres membres du groupe qui se tiennent en embuscade et mènent la charge finale.
Après 105 à 112 jours de gestation, la femelle met au monde deux à quatre lionceaux (rarement jusqu’à six) qui sont souvent élevés en communauté par l’ensemble des femelles. Les lionceaux pèsent 1,2 kg, sont sevrés à six mois et atteignent leur maturité sexuelle entre trois et quatre ans. La longévité atteint rarement plus de 16 ans dans la nature, couramment plus de 20 ans en captivité.
Auteur : Michel Louis, directeur du parc zoologique d’Amnéville pour le Manuel des aires protégées d’Afrique francophone (extrait)