Afin d’augmenter les débouchés pour les producteurs qui ne vendent en moyenne qu’un tiers de leur production aux conditions du commerce équitable, l’association Max Havelaar lance 3 nouveaux labels : les « Programmes d’Approvisionnement Fairtrade » pour le cacao, le sucre de canne et le coton. Ils entrent dans une logique d’approvisionnement, plus que de produit fini. Explications !
« En moyenne, un producteur de cacao ne vend que 28 % de sa production aux conditions du Fairtrade. S’il a le cahier des charges qui s’applique à l’ensemble de sa production, il ne vend ainsi aux conditions avantageuses du commerce équitable Fairtrade moins d’un tiers de sa production », regrette Marc Blanchard, Directeur général Max Havelaar France. Un tiers, alors que 100 % de leur production est certifiée et répond au cahier des charges Fairtrade/Max Havelaar, cela a de quoi faire grincer les dents… « On a vraiment là un problème de débouchés car la production existe, mais elle n’arrive pas à trouver de débouchés », note-t-il.
Aujourd’hui, seulement 1,2 % du cacao mondial est échangé aux conditions du commerce équitable Fairtrade/Max Havelaar. Pour le sucre de canne et le coton, les quantités sont encore moindres. Pour passer à la vitesse supérieure, l’ONG développe donc une approche complémentaire basée sur l’approvisionnement d’un seul ingrédient contenu dans le produit fini. Désignés comme « Programmes d’Approvisionnement Fairtrade » ils concernent le cacao, le sucre de canne et le coton. Au niveau international, le programme a été lancé fin janvier et dix entreprises importantes se sont déjà engagées. En France, les parties prenantes sont en cours de consultations. Le démarchage commercial commencera au deuxième trimestre 2014 pour un lancement en 2015.
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Une augmentation des ventes pour les producteurs attendue
Le nouveau programme d’approvisionnement Fairtrade pour le caco permettra de générer dès 2014 une hausse des ventes de 22 % grâce aux premiers contrats signés. Ces nouveaux accords commerciaux généreront une augmentation des ventes bénéficiant aux producteurs Fairtrade du Ghana, de Côte d’Ivoire, de République Dominicaine et du Pérou. L’ONG ne communique pas encore de chiffres officiels pour le sucre de canne et le coton.
Pour ces trois ingrédients entrant dans un Programme d’Approvisionnement Fairtrade, le cahier des charges de production est strictement le même que pour le label existant Fairtrade/Max Havelaar. Les producteurs continuent à recevoir tous les bénéfices de la certification Fairtrade, dont la Prime de Développement et le Prix Minimum Garanti. Simplement, « on ne labellise pas le produit fini, mais on va être sur un système d’ingrédient », précise Marc Blanchard.
Cela offre une plus grande marge de manœuvre aux entreprises et une plus grande facilité pour se fournir en produits équitables, en se concentrant sur une seule ou deux matières premières. Au final, cela offre également un plus large choix de produits aux consommateurs pour soutenir les producteurs grâce à leurs achats.
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Un risque de confusion pour le consommateur ?
Dans un contexte où les labels se multiplient, le consommateur ne risque-t-il pas de s’y perdre un petit peu ? Ce n’est pas l’avis de l’ONG. Car l’engagement est réel et lorsqu’il n’est que partiel, le consommateur n’en sera pas informé. Ainsi, l’entreprise ne pourra utiliser ce nouveau label que si 100 % du cacao utilisé pour faire le chocolat du produit, par exemple, répond au cahier des charges Fairtrade/Max Havelaar. Même dans ce cas, l’entreprise pourra préférer ne pas communiquer sur cet engagement auprès du consommateur. Elle ne fera qu’une simple communication institutionnelle, en inscrivant l’achat équitable et durable d’une de leurs matières premières au cœur de sa politique de Responsabilité sociétale des entreprises (RSE).
Ainsi, si Ferrero prévoit d’acheter 20 000 tonnes de cacao Fairtrade au cours des 3 prochaines années dans le cadre des nouveaux Programmes d’Approvisionnement Fairtrade Cacao, l’entreprise ne communiquera pas cet engagement sur ses emballages.
Si pour qu’un produit porte le label actuel Fairtrade/Max Havelaar, tous les ingrédients pouvant être équitables doivent l’être et correspondre au moins à 20 % du poids total du produit fini, il n’y a pas de règles strictes dans le cas des Programmes d’Approvisionnement pour la masse totale de l’ingrédient dans le produit fini. C’est pour cela que l’entreprise ne pourra labelliser le produit par le système d’approvisionnement que si 100 % de l’ingrédient utilisé est certifié. Ainsi, même si les volumes de l’ingrédient dans le produit fini ne sont pas très grands, avec l’engagement d’entreprises de grande consommation ou de grandes marques, les retombées pour le producteur pourront être importantes grâce aux volumes mis en jeu.
Ainsi, le but de ces nouvelles certifications est bien de trouver de nouveaux débouchés aux producteurs, dans un système qui malgré tout peine à se développer. Le marché des produits labellisés Fairtrade/Max Havelaar a continué sa progression en 2013, avec une hausse de 9 % par rapport à 2012, avec un chiffre d’affaires de 355 millions d’euros. Mais ce ne sont que 7,3 millions de foyers qui achètent des produits labellisés, 4 fois par an, en moyenne, pour un panier moyen de 16,8 €. La marge de progression est considérable ! Malgré le lancement du plan de relance du commerce équitable en 2013, qui visait à tripler les ventes du secteur en 3 ans, force est de constater que les résultats ne sont pas encore à la hauteur, puisque le panier moyen n’a augmenté que de 0,7 centimes en 1 an. Espérons que ces nouveaux labels y parviendront mieux et que le consommateur s’y retrouvera !
Auteur : Matthieu Combe, fondateur du webzine Natura-sciences.com
Il y a eu plusieurs enquêtes de journalistes qui démontraient que Max Havelaar n’avait plus grand chose à voir avec le commerce équitable