Dans le commerce équitable, l’offre alimentaire est déjà bien diversifiée. Les produits certifiés Fairtrade/Max Havelaar sont disponibles dans tous les lieux de consommation habituels : grandes surfaces, boutiques, ou vente par correspondance. Mais l’alliance entre le commerce équitable et la grande distribution est-elle réelle possible?
Le nombre de familles bénéficiaires du commerce équitable est estimé à 1,5 millions dans près de 60 pays d’après Max Havelaar France. Avec leurs familles, le système bénéficierait donc à 8 millions de personnes en Amérique latine, Afrique et Asie. Plus de 3 000 produits sont labellisés à ce jour dans l’alimentaire, la cosmétique, les fleurs et le textile.
Un système élargi aux plantations
En s’élargissant à des filières comme le thé en Inde, les fruits tropicaux dans certains pays africains ou les fleurs au Kenya, Max Havelaar a mis au point un cahier des charges adapté à ces réalités. En effet, ces produits sont dans certains pays essentiellement issus de plantations.
Au lieu d’un prix minimum garanti au producteur (cf. Max Haavelar pour un commerce plus équitable), la base du système repose sur la garantie que les conditions de travail et de vie des ouvriers respectent les conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT). Le cahier des charges concernant la production, la sécurité, la santé et les conditions de travail des salariés y est alors bien plus strict que pour les organisations de petits producteurs. La raison est simple : celles-ci ont davantage de moyens financiers et de meilleures capacités organisationnelles pour les mettre en place.
Dans les plantations, la prime de développement est versée à un comité rassemblant des représentants de travailleurs et des représentants de la direction de la plantation, avec une voix prépondérante réservée aux premiers. Seul ce comité peut décider de son utilisation. Ce principe donne aux travailleurs un pouvoir de décision sur des questions financières, ce qui est habituellement rarissime dans ce type de structure. Plusieurs types de plantations doivent cependant être distingués : les petites plantations familiales et les grandes plantations. Ces dernières sont rares dans le système, font l’objet d’un encadrement spécifique et leur engagement dans la démarche doit être très important. Fairtrade International reconnaît cependant qu’il reste beaucoup de travail à faire dans ce domaine.
Ne pas pousser la filière vers le bas
Des produits équitables sont vendus sous marque de distributeur (Auchan, carrefour, etc…) Notons que celles-ci gagnent actuellement des parts de marché, à l’instar du bio industriel vendu en grandes surfaces. Ces marques portent le label Fairtrade/Max Havelaar et respectent donc les standards minimum imposés par le cahier des charges du label. Les marques spécialisées, telles qu’Alter Eco ou Ethiquable, ont une vision du commerce équitable plus exigeante que le cahier des charges en question, notamment concernant les prix payés aux producteurs.
Il ne faut cependant pas avoir une vision manichéenne de la question. Qui dit marque de distributeur ne dit pas systématiquement approvisionnement depuis des plantations. Cependant, le manque d’engagement sur le terrain et le manque de suivi des filières de la part de ces gros acteurs est un risque tant pour le bon développement du commerce équitable que pour la crédibilité de la démarche aux yeux du consommateur.
Des engagements variables
Si les marques spécialisées jouent la transparence totale sur les prix, les marques de distributeur ne jouent pas toujours le jeu. Ainsi, si le producteur touche bien un prix garanti et une prime de développement, les économies sont faites sur la chaîne qui n’entre pas dans le cahier des charges du commerce équitable. Il s’agit de toute la chaîne qui se trouve après les coopératives de producteurs, à savoir la transformation, le transport et la distribution. Ces marques font en effet des économies d’échelle, car elles utilisent souvent les mêmes circuits de transformation que leur produits non équitables, ce qui leur permet de négocier les prix à la baisse. Elles atteignent ainsi de gros volumes industriels, alors que les PME spécialisées en produits équitables payent plus cher la transformation. Il reste un atout majeur aux marques spécialisées : des qualités gustatives supérieures à leurs concurrents situés dans les mêmes rayons de grandes surfaces qui alimentent le marché en produits de base.
Max Havelaar incite les distributeurs à limiter la marge qu’ils réalisent sur les ventes de produits équitables. Il faut toutefois garder à l’esprit que la notion de « commerce équitable » intègre le terme « commerce ». L’approche respectueuse des producteurs est au centre de tout, mais pour que cela fonctionne à long terme, il est essentiel que l’ensemble des entreprises puissent vivre de cette activité.
Auteur : Matthieu Combe, fondateur du webzine Natura-sciences.com
Référence
[1] Vous pouvez voir la liste complète sur le site www.maxhavelaarfrance.com