L’association No plastic in my sea publie un rapport d’enquête sur l’application de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC). Pour Natura Sciences, Muriel Papin, déléguée de l’association, alerte sur les manques d’application et de connaissance de la loi.
La semaine européenne de réduction des déchets se déroule du 20 au 28 novembre. Ce jeudi 18 novembre, l’association No plastic in my sea publiait un rapport d’enquête sur l’application de loi AGEC (Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire) dans la restauration à emporter. Muriel Papin, déléguée générale de l’association, alerte sur le manque d’application de la loi. Une loi dont les articles sont “insuffisamment connus, des consommateurs comme des enseignes.”
Lutter contre les déchets de la restauration rapide
Plus de 220 000 tonnes d’emballages par an proviennent de la restauration rapide selon l’ADEME. Souvent composés de plastique, les déchets de la restauration présentent un risque important de rejet dans la nature et de pollution. Ce risque provient des incivilités, du manque de poubelles dans la rue, mais aussi de poubelles qui débordent.
Promulguée en février 2020, la loi AGEC vise à réduire les déchets de la restauration à emporter et encourager le réemploi. “Un des enjeux de la loi est de faire moins pression sur les ressources”, explique Muriel Papin, déléguée générale de l’association No Plastic in my sea.
Pour cela, la loi AGEC prévoit notamment la possibilité pour le consommateur de venir avec ses contenants pour ses boissons et repas. Existe aussi un tarif réduit sur les boissons si le client apporte son propre contenant. Ou encore l’indication visible du droit à l’eau potable gratuite pour les consommateurs.
Une loi peu percutante
Dans son rapport d’enquête l’association environnementale No plastic in my sea déplore un très faible taux de réponse des enseignes. En effet, sur 42 chaînes interrogées, seules six ont répondu à l’enquête.
Ainsi, ces enseignes ont soit engagé pour partie les mesures prévues par la loi AGEC, soit évoqué des arguments d’hygiène les amenant à refuser l’accueil des contenants des clients. En cela, Muriel Papin admet que “la profession a été chahutée et a besoin de délais pour appliquer la loi.”
Mais l’association considère que l’argument sanitaire, même dans un contexte de pandémie, n’est pas irréfutable. “Il y a des solutions pour désinfecter le contenant et même pour éviter le contact avec ce dernier”, relève Muriel Papin. Une solution mise en œuvre pendant le Covid par Réseau Vrac qui proposait de désinfecter les contenants des consommateurs.
Des enseignes peu volontaires
L’enquête souligne également que prendre une boisson à emporter dans son contenant est difficile et la réduction financière prévue n’est pas au rendez-vous. Seules cinq enseignes l’appliquent, avec des réduction de 5 à 50 centimes : Starbucks, Prêt à Manger, Pomme de Pain, Exki, Le Pain Quotidien.
Mais ces enseignes ne sont pas vertueuses sur tout. “Prêt à manger fait bien une réduction de 5 centimes mais tous ses aliments sont emballés”, déplore Muriel Papin. “On a le sentiment qu’Exki fait beaucoup d’efforts, notamment sur le choix des matériaux”, équilibre-t-elle.
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D’autre part, les grandes chaînes sont difficiles à convaincre. “Burger King, Mc Donald’s, O’Tacos n’acceptent rien du tout”, signale la déléguée générale. L’enquête dénonce aussi le passage sous silence du droit à de l’eau potable gratuite. “Un manque à gagner”, selon Muriel Papin qui rappelle que les enseignes se font une marge non négligeable sur les boissons.
Les process et les contrôles pèchent
Selon Muriel Papin, le principal frein des enseignes vient des process. “Les produits sont déjà emballés et l’objectif est de vendre le plus rapidement possible. Tout est processé dans ce sens”, détaille-t-elle. Et selon l’association, les process et la digitalisation poussent à la consommation et ne respectent pas l’information du consommateur et son droit à un mode de consommation plus responsable.
En complément, l’association a mené une enquête de terrain dans 102 établissements. Celle-ci met en lumière une application de la loi très limitée. En effet, l’association a établi que le service de plats dans un contenant réutilisable était rarement possible.
“Si on refuse de me servir dans mon contenant, l’amende pour une personne morale peut aller jusqu’à 2.250 euros”, indique Muriel Papin. Mais pour arriver à cette procédure, il faut des contrôles de la part des administrations territoriales. “Souvent, ce sont les contrôles qui pèchent. La sanction existe mais reste plutôt théorique”, relate la déléguée.
Encourager les consommateurs
L’incitation financière est essentielle puisque c’est “un encouragement du consommateur”, considère Muriel Papin. D’ailleurs, celle prévue par la loi pour les boissons “devrait s’appliquer sur les repas”, ajoute la déléguée. “Il faut montrer que ce n’est pas si compliqué, inciter par la communication et souligner que les contenants sont obligatoirement acceptés”, résume-t-elle.
Le plus compliqué est d’avoir toujours tous ses contenants dans son sac. “Mais par exemple, au bureau, stocker tout le matériel est assez simple”, insiste Muriel Papin. L’enjeu est d’identifier les situations où les consommateurs peuvent facilement intégrer cette volonté à leur quotidien.
L’association recommande ainsi de valoriser les acteurs qui appliquent la loi et de récompenser le consommateur dans son effort pour réduire les déchets. Pour sa campagne d’action pendant la semaine européenne de réduction des déchets, No plastic in my sea publiera sur son site la liste des entreprises acceptant les contenants et accordant une réduction.
Jeanne Guarato