Une nouvelle étude estime que le réchauffement climatique et les énergies fossiles multiplient déjà les maladies. Et ce dans de vastes régions du monde. Les résultats, décrits dans le journal médical The Lancet, annoncent de grands bouleversements.
On ne répétera jamais assez que le réchauffement climatique n’est pas uniforme sur Terre. Et les populations se concentrent dans des zones où celui-ci est plus important. Notamment en Inde, dans certaines parties de la Chine et en Afrique sub-saharienne. « Le réchauffement moyen auquel ont été confrontés les humains est de 0,9°C entre 2000 et 2016, soit plus du double de la hausse de la température moyenne mondiale sur la même période (0,4°C) », estime le rapport.
En 2015, la Commission du journal The Lancet estimait que le changement climatique menaçait d’effacer tous les gains enregistrés en matière de santé publique depuis 50 ans. Elle a alors lancé l’initiative Compte à rebours du Lancet pour suivre les impacts sur la santé des changements climatiques. Celle-ci associe 24 institutions, dont l’OMS et la Banque mondiale.
Le réchauffement, c’est évidemment plus de vagues de chaleur
Les vagues de chaleur exposent de plus en plus de personnes âgées de plus de 65 ans dans le monde. Leur nombre a augmenté de 125 millions entre 2000 et 2016. Un nouveau record date de 2015, exposant 175 millions de personnes dans cette tranche d’âge. Et les vagues de chaleur pourraient toucher près d’un milliard de personnes supplémentaires d’ici 2050. En Europe, les canicules pourraient provoquer entre 60.000 et 165.000 décès par an à partir de 2080.
Il est difficile de chiffrer la productivité des travailleurs. L’étude estime toutefois que la hausse des températures affectera particulièrement celle des travailleurs extérieurs en milieu rural. La diminution serait de 5,3 % depuis 2000. En 2016, ce sont ainsi plus de 920.000 personnes qui auraient été été exclues du marché du travail, dont 418.000 en Inde.
Réchauffement climatique et maladies : sous-nutrition, dengue et dettes en perspective
Pour chaque degré de réchauffement climatique, les auteurs de l’étude estiment que la production mondiale de blé diminuera de 6 % et celle de riz de 10 %. La sous-nutrition serait ainsi l’une des principales menaces sanitaires liées au réchauffement. Dans un monde réchauffé, la dengue continuera aussi son expansion. C’est déjà la maladie qui se répand le plus rapidement au monde. Le nombre d’infections s’élève entre 50 et 100 millions chaque année. Deux types de moustiques ont déjà vu leur capacité vectorielle à transmettre la dengue augmenter de 3 % et 6 % depuis 1990.
Par ailleurs, plus d’un milliard de personnes dans le monde pourraient être forcés à émigrer d’ici 90 ans. En cause: l’élévation du niveau de la mer. Autre enseignement et non des moindres: le monde aurait connu une augmentation de 46 % des catastrophes liées aux conditions météorologiques depuis 2000. Pour la seule année 2016, les pertes économiques causées par des événements climatiques se sont élevé à 129 milliards de dollars. Et 99 % de ces pertes ont eu lieu dans des pays à faible revenu et non assurés.
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Un air pollué qui condamne les plus pauvres
Le réchauffement climatique est principalement lié aux énergies fossiles. Outre des gaz à effet de serre, leur combustion conduit à l’émission de quantités de particules. Ainsi, dans le monde, 71% des 2.971 villes suivies par l’OMS présentent une concentration moyenne annuelle de particules fines (PM 2,5) dans l’air supérieure au seuil conseillé. L’exposition globale a augmenté de 11,2 % depuis 1990. Cela signifie que des niveaux dangereux de particules fines concernent des milliards de personnes dans le monde. En France, la concentration moyenne est supérieure au seuil conseillé, avec un pic national plus de deux fois supérieur à Pantin.
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La mauvaise qualité de l’air a des répercussions sur la santé. Elle augmente les taux d’accidents vasculaires cérébraux (AVC), de maladies cardiaques, de cancer du poumon et de maladies respiratoires chroniques et aiguës. Plus de 1,9 million de décès prématurés ont été attribués à la pollution de l’air dans 21 pays d’Asie du sud-est en 2015. Deux pays, la Chine et la Corée du Nord, en ont comptabilisé plus de 700.000 chacun.
Malgré l’ampleur du défi, les auteurs restent convaincus que l’adaptation au changement climatique peut être l’occasion d’améliorer la santé publique. Les opportunités sont énormes. L’adaptation permettrait d’assainir l’air des villes polluées, offrir des régimes plus nutritifs et assurer la sécurité énergétique, alimentaire et hydrique. Ce serait également l’opportunité de réduire la pauvreté et les inégalités sociales et économiques. « Il est essentiel que les professionnels de santé fassent entendre leur voix afin de stimuler les progrès en matière de lutte contre le changement climatique et de tirer les bénéfices associés pour la santé », préviennent-ils.