La crise sanitaire a engendré une nouvelle pollution : les masques, gants et autres lingettes abandonnés sur les trottoirs, les routes et dans la nature. Face à cette nouvelle pollution et à ses risques sanitaires, la diffusion des bons gestes et les sanctions s’organisent.
Les recommandations officielles les plus diffusées pour le grand public invitent à « utiliser un mouchoir à usage unique et le jeter ». Mais pour quelques Français, il aurait sans doute fallu ajouter « dans une poubelle » et leur spécifier que les masques, gants et lingettes devaient aussi être jetés dans une poubelle. Résultat : de plus en plus d’objets potentiellement contaminés par le coronavirus ou autres miasmes se retrouvent dans l’environnement.
Face à ces incivilités, la mobilisation s’organise. La secrétaire d’État à la Transition écologique Brune Poirson travaille sur un projet de décret visant à sanctionner ce geste. Ainsi, jeter un masque, un mégot ou tout autre déchet sur la voie publique pourra bientôt être sanctionné d’une amende de 135 euros. Contre 68 euros actuellement. Si la police établit un procès-verbal et le transmet au tribunal, l’amende pourrait même gonfler jusqu’à 375 euros, voire 750 euros.
Des consignes simples à appliquer
Les consignes plus poussées des pouvoirs publics invitent à adopter des gestes simples pour se débarrasser de façon sécurisée de ces équipements. Hors de son domicile, il faut jeter masques, mouchoirs, lingettes et gants dans une poubelle. Attention à ne pas les jeter dans une poubelle de tri sélectif, car ces déchets ne sont pas recyclables et pourraient contaminer les opérateurs de tri. Les personnes malades, contacts ou ayant des symptômes doivent suivre les recommandations du ministère des Solidarités et de la Santé.
Ces recommandations invitent à placer tous les déchets susceptibles d’être contaminés dans un sac plastique dédié. De 30 litres maximum, opaque, il sera doté d’un système de fermeture fonctionnel. Après fermeture, il doit être placé dans un deuxième sac plastique, et être stocké à domicile au moins 24 heures avant d’être jeté dans les ordures ménagères.
Une campagne par Gestes Propres
Spécialisée dans la lutte contre les déchets sauvages, l’association Gestes Propres a décidé de cibler sa campagne estivale sur ce nouveau fléau. L’association rappelle que « l’abandon des équipements de protection mettent non seulement en danger l’environnement, mais également la santé de tous, en particulier celle du personnel de propreté des collectivités locales, mais aussi des agents de collecte et des équipes en centres de tri, risquant la propagation du virus ».
Les masques, gants et lingettes sont à même de libérer facilement des microplastiques sous l’effet des UV, du vent et de l’abrasion. Comme tous les autres déchets charriés par les pluies et les vents, macro-déchets et microplastiques finiront enterrés dans les sols ou rejoindront mers et océans.
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Un débat plus général autour de l’usage unique
La crise sanitaire a a relancé le débat sur les plastiques à usage unique. « D’un côté, des associations de protection de l’environnement ont renforcé leur plaidoyer contre les plastiques à usage unique, revigorées par les nouvelles formes de pollution apparues à la faveur de l’épidémie, partagent Angèle Préville et Philippe Bolo, parlementaires, membres de l’OPECST (Office Parlementaire d’Évaluation des Choix Scientifiques et Technologiques) et co-rapporteurs d’une étude en cours sur la pollution plastique. Face à elles, les intérêts de la plasturgie, d’abord à l’échelle européenne, puis ensuite à l’échelle nationale, ont prétexté l’utilité des équipements sanitaires pour réclamer un moratoire des échéanciers de sortie des plastiques à usage unique. »
La loi Anti-gaspillage qui vise la fin des plastiques à usage unique en 2040. Brune Poirson rappelle qu’elle travaille sur un décret application pour janvier 2021. Ce premier décret quinquennal définira des objectifs de réduction de plastiques à usage unique pour la période 2021-2025. Il s’agit de la première étape pour arriver en 2040 à une société du tout réutilisable. « L’industrie du plastique à usage unique est en train de surfer la vague, dénonce Brune Poirson le 8 juin lors d’une réunion Zoom organisée par l’Iddri sur la pollution plastique. Cela consiste à faire des amalgames entre l’usage unique médical sanitaire et l’usage unique plus général dans tous les plastiques du quotidien. » Avant de rappeler : « Le plastique n’est pas la barrière aux microbes que l’on veut nous faire croire. » Pour éviter de retrouver les masques dans l’environnement, « on peut se demander si leur substitution par des masques en tissu, lavables et réutilisables ne devrait pas être davantage promue », s’interrogent simplement Angèle Préville et Philippe Bolo.
Auteur : Matthieu Combe, journaliste de Natura Sciences