Plastic Odyssey est une aventure hors norme partie de Marseille ce samedi 1er octobre. Durant trois ans, son bateau carburant en partie aux plastiques non recyclables fera escale sur les côtes des pays en développement les plus touchées par la pollution plastique. Son objectif : y créer des filières locales de valorisation des plastiques pour qu’ils ne finissent plus dans les océans.
Après un cinq ans de préparation, le bateau de l’expédition française Plastic Odyssey a quitté Marseille ce samedi 1er octobre. Direction Beyrouth au Liban avec une arrivée mi-octobre, avant de rejoindre Alexandrie en Égypte début novembre. En tout, l’équipage fera plus de 30 escales principales de trois semaines. Elles auront lieu sur trois continents : l’Afrique, l’Amérique du sud et l’Asie l’Asie Pacifique. À chaque escale, l’une des principales actions consistera à sélectionner et accueillir une dizaine d’entrepreneurs à bord pour les former à lancer un centre de recyclage plastique. Un atelier embarqué comprenant sept machines capables de valoriser des déchets plastiques en nouveaux objets ou en carburant servira de banc d’essai pour les formations et le prototypage des produits recyclés.
Simon Bernard, co-fondateur et président de Plastic Odyssey est de ces jeunes entrepreneurs qui veulent changer la face du monde. « J’ai travaillé pendant deux ans sur le projet Nomade des mers, se rappelle-t-il. Pendant deux semaines sur le bateau à Dakar, j’ai vu qu’il y avait du plastique partout. À côté de cela, plein de gens venaient nous voir pour qu’on leur donne des petits boulots. J’ai compris qu’on pouvait mettre à leur disposition des machines open-source pour qu’ils puissent monter leur petite entreprise. » Grâce à ces nouvelles entreprises, des centaines de personnes vivront de la collecte des déchets tout en nettoyant les côtes.
Une expédition maritime contre la pollution plastique
« Une expédition maritime est l’idéal pour être confronté à la réalité du terrain », présage cet ingénieur de l’École Nationale Supérieure Maritime (ENSM), officier de la marine marchande. Ainsi, Plastic Odyssey pourra adapter ses machines aux besoins locaux en Asie, en Amérique et en Afrique. Les aventuriers embarqueront sur ce bateau propulsé en partie grâce à du plastique non recyclable. Pour ce faire, chaque escale sera l’occasion de ramasser des déchets plastiques à terre. À bord, ils seront triés, puis transformés en objets. Le reste non recyclable (emballages fins, sacs…) sera converti en carburant pour faire avancer le navire. Objectif : collecter les plastiques pour montrer qu’ils ont une vraie valeur économique afin qu’ils ne finissent plus dans les océans.
90 % du plastique entrant dans les océans provient d’Afrique, Amérique du Sud et d’Asie. Ce sont les trois continents où il faut agir en priorité. Ainsi, le bateau sillonnera les mers du monde et s’arrêtera sur les ports majeurs pendant plus de trois ans. En plus de la formation aux entrepreneurs, les escales permettront de chercher des modèles existants efficaces de valorisation des plastiques et de les documenter. L’équipe diffusera aussi les plans de ses solutions pour que les acteurs locaux s’en emparent.
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Créer des entreprises locales de recyclage
Les technologies à embarquer sont diverses. Il s’agit de machines « low tech » que les membres de l’expédition ont conçus afin qu’ils soient simples à répliquer partout dans le monde et avec très peu d’outils. Elles broient le plastique, le lavent, le sèchent, le fondent, l’extrudent, le compressent… pour l’injecter dans des moules et fabriquer des objets. Ces solutions mises bout à bout permettront par exemple de fabriquer des meubles, des briques de construction, des tuiles ou des isolants. L’idée réside bien dans le fait de répliquer ces machines lors des escales, auprès d’entrepreneurs locaux, pour faire naître un intérêt économique à la collecte et au recyclage des déchets plastiques.
Pour répondre à ces besoins, le bateau se divise en deux parties distinctes. « L’arrière du bateau est nommé « clean up the past » : c’est l’expérimentation sur le recyclage avec les machines, détaille Simon Bernard. Plastic Odyssey a développé des solutions technologiques et des programmes de formation afin de favoriser l’entrepreneuriat du recyclage plastique dans les régions dépourvues de systèmes de gestion de déchets. « L’avant s’appelle « build the future » avec une zone d’exposition des alternatives au plastique : nouveaux matériaux, nouveaux design, nouveaux usages… »
Transformer les plastiques en carburant
Un container embarqué à bord permet de transformer les plastiques non recyclables en carburant. Le procédé ressemble à celui utilisé pour faire de l’alcool. De façon simplifiée, il consiste à chauffer le plastique en absence d’oxygène. Cela permet de casser les molécules et de les convertir en essence et diesel.
« Un moteur dédié relié à un groupe électrogène sert de banc d’essai à partir du carburant de pyrolyse, partage Simon Bernard. L’idée est d’injecter ce carburant dans les moteurs après les tests et après autorisations des assurances des affaires maritimes pour arriver à faire une traversée 100% au fuel de pyrolyse d’ici 1 an ou 2. » Le système sera ensuite adapté avant d’être répliqué et proposé à des acteurs locaux. La solution pourrait ainsi produire du carburant pour les petits bateaux de pêche, les mobylettes ou les générateurs diesel.