Une enquête Ipsos réalisée pour la Fondation Nicolas Hulot révèle que 90% des Français déclarent faire confiance à la science. Pourtant, selon les thématiques sur lesquelles s’expriment les scientifiques, le crédit apporté par le public peut varier. Certains sujets controversés liés à la santé, comme la Covid-19, favorisent ce phénomène.
Réchauffement climatique, préservation des écosystèmes ou encore crise sanitaire contribuent à mettre la parole scientifique au cœur de l’actualité. Afin de savoir comment les Français perçoivent la science, la Fondation Nicolas Hulot (FNH) a commandé une enquête à l’institut de sondage Ipsos. C’est ainsi que du 16 au 21 octobre, un échantillon de 2000 personnes représentatives de la société française a été interrogé.
Le 5 novembre dernier, à l’occasion des vingt ans du conseil scientifique de la Fondation, les résultats de l’étude intitulée « Les attitudes des Français à l’égard de la science » ont été dévoilés. Premier élément notoire : il apparaît que 69% des Français s’intéressent à la science. Cet attrait s’élève à 78% chez les hommes, et à 61% chez les femmes. Les 18-24 ans, les 45-59 ans, et les électeurs du Rassemblement national (RN) sont ceux qui disent s’y intéresser le moins. Pour ces trois catégories, la proportion d’intérêt s’élève à 64%.
Une confiance en la science large et en expansion
La deuxième information capitale est que 90% des Français déclarent faire confiance à la science. « Dans un monde connecté comme le nôtre, la science peut jouer un rôle de boussole » a déclaré l’économiste Patrick Criqui, membre du conseil scientifique de la FNH. Cela peut contribuer à expliquer la forte adhésion que la science rencontre chez les habitants de l’Hexagone. L’âge des personnes interrogées n’influe pas sur leur degré de confiance. Ainsi, les 18-24 ans et les 60 ans et plus font partie des sondés qui ont répondu le plus positivement.
En revanche, la sensibilité politique des sondés a, quant à elle, une incidence sur le rapport à la science. Selon les données communiquées par Ipsos, les sympathisants du Parti Socialiste (PS) et de La République en Marche (LREM) affirment leur confiance respectivement à 95% et à 97%. Mais de manière générale, durant cette dernière décennie, le crédit accordé à la science a augmenté. En 2011, l’indice de confiance s’élevait à 87%, soit trois points de moins qu’aujourd’hui. De ce fait, la confiance accordée à la science est bien plus forte que pour d’autres domaines. En 2020, la confiance accordée au gouvernement n’est que de 33%. Et elle tombe même à 26% lorsqu’il s’agit des médias.
Des experts peu scientifiques, place aux « fake news »
Le détail des données démontre que cette confiance peut varier selon le type de sujet abordé. Quand les scientifiques s’expriment sur des sujets soumis à controverse, les Français doutent de leur capacité à dire la vérité. Lorsqu’il s’agit de nucléaire ou de 5G, une personne interrogée sur deux se déclare confiante pour accéder à la vérité. Mais dès lors qu’il s’agit d’OGM ou de pesticides, le scepticisme augmente. Environ un tiers des Français seulement fait confiance aux scientifiques sur ces sujets.
Notons que la méfiance des habitants de l’Hexagone au sujet de la Covid-19 s’est intensifiée au cours des derniers mois. En mai 2020, 47% des Français faisaient confiance aux scientifiques à ce sujet. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 39%. Par ailleurs, 18% des Français font preuve de plus de défiance du fait des controverses et des nombreuses contradictions liées au coronavirus. Cette perte de confiance peut s’expliquer par la multiplication des experts qui se succèdent dans les médias. En effet, 61% des personnes interrogées estiment qu’il est difficile de dire si ces experts sont réellement compétents ou non.
Pour Thierry Libaert, professeur en sciences de l’information et de la communication et membre du conseil scientifique de la FNH, cela s’explique par le choix des experts sollicités. « Un fort brouillage s’est créé à cause des médias et leurs experts qui ne sont pas de vrais scientifiques » déplore-t-il. De plus, la mécanique des programmes laisse souvent la place à un contradicteur. Or, cela renforce la possibilité de remettre en question toutes les informations véhiculées, qu’elles soient bonnes ou mauvaises. De ce fait, le risque est de laisser davantage de champ d’expression aux « fake news ». Et malheureusement, ces dernières se propagent sept fois plus rapidement que les informations véridiques.
Auteur : Chaymaa Deb, journaliste de Natura Sciences