Les derniers engagements climatiques déposés par les États signataires de l’Accord de Paris sont « très loin » des objectifs, a dénoncé vendredi l’ONU. António Guterres appelle à renforcer l’ambition de leur engagement.
Les quelque 200 signataires de l’Accord de Paris en 2015 devaient soumettre avant le 31 décembre 2020 leurs engagements révisés, appelés « contribution déterminée au niveau national » (NDC). Mais seuls 75 pays (dont les membres de l’UE) l’ont effectivement fait, représentant seulement 30% des émissions mondiales. Selon l’ONU, l’impact combiné des plans mène à une trajectoire de baisse des émissions de seulement 1% en 2030 par rapport à 2010. Cela reste bien loin des -45% nécessaires pour une trajectoire 1,5°C, ou même des -25% à viser pour 2°C comme l’ont estimé les experts du GIEC.
Ce rapport constitue « une alerte rouge pour notre planète », insiste le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, dans un communiqué. « En 2021, ça passe ou ça casse pour l’urgence climatique mondiale. La science est claire, pour limiter la hausse des températures à 1,5°C, nous devons réduire les émissions de 45% d’ici à 2030 par rapport à 2010″, ajoute-t-il.
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De nouveaux engagements bien avant la COP26
« Les émetteurs les plus importants doivent présenter des objectifs de réductions des émissions bien plus ambitieux pour 2030 dans leurs contributions nationales bien avant la conférence climat de Glasgow (COP26) en novembre », insiste António Guterres, alors que cette COP26 cruciale a déjà été reportée d’un an en raison de la pandémie de Covid-19. L’ONU fera un nouveau rapport d’évaluation des NDC avant cette échéance.
De nouveaux objectifs sont attendus de la part des États-Unis d’ici au sommet climat de John Kerry le 22 avril. Le nouveau président Joe Biden est déjà revenu dans l’accord de Paris. La Chine dévoilera pour sa part son nouveau plan quinquennal le 5 mars. Le pays s’est engagée à la neutralité carbone d’ici à 2060 mais n’a pas déposé de nouvelle NDC.
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Ne pas mettre tout le monde dans le même panier
Malgré les critiques sur les contributions combinées évaluées dans le rapport, Helen Mountford, du World Resources Institute, appelle à différencier les pays. Certains ont présenté « des objectifs audacieux« , mais ils sont « éclipsés » par ceux « qui sont à la traîne ».
Selon l’analyse des experts de Climate Action Tracker, parmi les grandes économies qui ont soumis de nouveaux objectifs en 2020, seuls le Royaume-Uni, l’UE, l’Argentine, le Chili, la Norvège, le Kenya et l’Ukraine ont réellement relevé leur ambition. Le Japon, la Corée du Sud, la Russie, la Nouvelle-Zélande, la Suisse et l’Australie ont tous présenté des plans qui n’améliorent pas leur objectif fixé en 2015. Quant au Brésil, il n’a pas fixé d’objectif de réduction des émissions pour 2030, ni prévu d’endiguer la hausse des taux de déforestation.
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Un certain nombre de pays mettent en avant la crise sans précédent du Covid-19 pour différer leur engagement climatique. Un argument qui peut parfois être compréhensible, note Mme Espinosa. « Mais l’urgence climatique ne s’est pas arrêtée pour la pandémie et elle ne va pas disparaître parce qu’il y a une autre urgence », insiste-t-elle, appelant à saisir l’opportunité de la relance pour accélérer la transition écologique. « Nous ne pouvons retourner aux anciennes habitudes (…) et les gros émetteurs, en particulier les pays du G20, doivent montrer la voie ».
Matthieu Combe, avec AFP