Plusieurs entreprises et centres de recherche travaillent sur la route du futur. L’Ifsttar s’intéresse notamment à la route intelligente depuis quelques années et a lancé le projet « R5G » pour développer la route communicante de demain.
La route du futur sera sûrement composée de matériaux innovants lui permettant de s’auto-réparer et d’être autonome en énergie. La chaussée sera chauffante ou refroidissante en fonction des conditions météorologiques. Elle fera également la part belle aux matériaux bio-sourcés pour remplacer les matériaux d’origine pétrolière.
Bientôt, la route pourra auto-diagnostiquer une déformation de la chaussée ou envoyer des informations sur le trafic. Pour ce faire, elle renfermera des capteurs de déformation interconnectés, des fibres optiques ou des nanomatériaux.
La route du futur sera-t-elle solaire ?
Demain, les routes seront peut-être transparentes ou semi-transparentes, avec des capteurs photovoltaïques sous la surface de chaussée. Le projet Solar roadways aux Etats-Unis et Solar road aux Pays-Bas sont les plus avancés. Les Pays-Bas viennent d’ailleurs d’inaugurer une piste cyclable solaire renfermant des panneaux photovoltaïques et une surface de chaussée en verre.
L’Iffstar travaille également sur ce sujet depuis 2012. « On travaille sur des revêtements en verre pilé qui ressemblent à du béton bitumineux classique, avec un aspect semi-transparent. Le liant entre le verre pilé est soit végétal soit une résine classique », confie Nicolas Hautière, Directeur de projet R5G à l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux (Ifsttar). L’électricité produite pourra être injectée dans le réseau électrique public, alimenter les éclairages de la route ou recharger les batteries des véhicules électriques en roulant.
Une chaussée chauffante ou refroidissante
Pour refroidir une route en été ou la dégivrer en hiver, l’Iffstar envisage de faire circuler sous la chaussée un fluide caloporteur. « On vient transformer la route en pompe à chaleur », présente Nicolas Hautière. « On vient faire un échangeur de chaleur entre la couche de chaussée et le sous-sol : en été, le fluide chauffe au contact du soleil et transporte la chaleur au sous-sol. L’hiver, c’est l’inverse, on fait monter la chaleur pour réchauffer la chaussée », résume-t-il. L’Ifsttar mène actuellement un test sur ce procédé à Aigleton, sur le site de l’Ecole d’Application aux métiers des Travaux Publics (EATP).
Pour une meilleure adaptation au changement climatique, les chercheurs revisitent également le concept de « chaussée-réservoir » ou « chaussée-poreuse », technologie datant des années 1980. Ces chaussées permettent de stocker les eaux pluviales dans le corps de chaussée. Cela permet de réguler l’écoulement des eaux, afin de ne pas saturer le réseau d’eaux pluviales et éviter ainsi les risques d’inondations en cas de fortes pluies.
Les micro-algues remplaceront le bitume
Rappelons-le, le béton est un mélange de granulés (gravillons, sables…) et d’un liant permettant de les agglomérer. Ce liant est souvent du bitume, un mélange très visqueux d’hydrocarbures fossiles.
Le matériau de la route du futur se doit donc d’être plus écologique. L’Ifsttar travaille sur des matériaux comprenant des liants bio-sourcés, notamment à base de micro-algues, pour préparer l’ère post-pétrole. « Si la filière micro-algues se met en place pour produire des biocarburants, nous pourrons utiliser les déchets de production pour faire des liants pour les routes », assure Nicolas Hautière. « Cela permettra de remplacer les liants bitumineux issus du bas de la chaîne de raffinage du pétrole, par un liant naturel d’origine micro-algale », précise-t-il. Cet enjeu a été exploré dans le cadre du projet Algoroute.
La route du futur, c’est pour quand et à quel prix ?
« Les technologies vont se déployer petit à petit », prévoit Nicolas Hautière. La rapidité de diffusion des innovations dépendra des industriels, des financements, des politiques et de l’acceptabilité de la société. « Si l’on veut passer à grande échelle sur des démonstrateurs sur des routes circulées, l’obstacle n’est plus le financement, mais le politique », défend-il.
Ces démonstrateurs devront intégrer plusieurs sous-ensembles de ces innovations. Il faudra évaluer la synergie entre les solutions techniques, mais également identifier les éventuels problèmes de mises en œuvre simultanées. Les premiers transferts industriels à grande échelle sont prévus d’ici 2020.
Quels en seront les coûts et comment les travaux seront-ils financés? C’est la grande inconnue pour le moment. Malheureusement, la mise au ban de l’écotaxe n’est pas actuellement une bonne nouvelle pour le financement de ces infrastructures. Il faudra donc rapidement concevoir de nouveaux outils de politiques publiques pour financer le déploiement des différentes combinaisons innovantes de la R5G à l’ensemble du territoire. Une chose est néanmoins sûre : « Si l’on arrive à faire des choses plus intégrées, préfabriquées et diffusées à grandes échelles, cela coûtera moins cher que d’avoir des technologies indépendantes les unes des autres qui se développent une à une », affirme Nicolas Hautière.
Néanmoins, plusieurs interrogations demeurent sans réponses et révèlent les défis à relever : Quelle sera la durée de vie de ces technologies par rapport à l’infrastructure? Comment traiter les données (big data) lorsque ces routes seront généralisées ? Faut-il privilégier le réseau autoroutier, les routes nationales ou les routes urbaines ? Comment prioriser les zones à installer ?
Alors, la route du futur comprendra-t-elle une chaussée transparente, sous laquelle se trouveront des panneaux solaires, un fluide caloporteur, des capteurs et des matériaux bio-sourcés? Réponse prochainement !
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Auteur : Matthieu Combe, fondateur du webzine Natura-sciences.com